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ABISAG.

Oui-dà, milord, j’en ai bien réchauffé d’autres.

BETHSABÉE.

Voilà donc comme tu m’abandonnes ; tu ne m’aimes plus ! et que deviendra mon fils Salomon, à qui tu avais promis ton héritage ?

DAVID.

Oh ! je tiendrai ma parole ; c’est un petit garçon qui est tout à fait selon mon cœur, il aime déjà les femmes comme un fou : approche, petit drôle, que je t’embrasse : je te fais roi, entends-tu ?

SALOMON.

Milord, j’aime bien mieux apprendre à régner sous vous.

DAVID.

Voilà une jolie réponse ; je suis très-content de lui : va, tu régneras bientôt, mon enfant ; car je sens que je m’affaiblis ; les femmes ont ruiné ma santé ; mais tu auras encore un plus beau sérail que moi.

SALOMON.

J’espère m’en tirer à mon honneur.

BETHSABÉE.

Que mon fils a d’esprit ! Je voudrais qu’il fût déjà sur le trône.


Scène IV.

Les personnages précédents, ADONIAS.
ADONIAS.

Mon père, je viens me jeter à vos pieds.

DAVID.

Ce garçon-là ne m’a jamais plu.

ADONIAS.

Mon père, j’ai deux grâces à vous demander : la première, c’est de vouloir bien me nommer votre successeur, attendu que je suis le fils d’une princesse, et que Salomon est le fruit d’une bourgeoise adultère, auquel il n’est dû, par la loi, qu’une pension alimentaire, tout au plus : ne violez pas en sa faveur les lois de toutes les nations.

BETHSABÉE.

Ce petit oursin-là mériterait bien qu’on le jetât par la fenêtre.