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ANNÉE 1768.

encore sur sa friperie un décret de prise de corps du parlement de Paris, qu’il s’attira quand il était porte-Dieu à la Sainte-Chapelle-Basse. En tout cas, je suis très-bien avec mon curé, j’édifie mon peuple ; tout le monde est content de moi, hors les filles.

Que Dieu vous ait en sa sainte garde, mes chers anges ! Je ne sais pas ce que c’est que la vie éternelle, mais celle-ci est une mauvaise plaisanterie

À propos, j’ai coupé la tête à des colimaçons[1] : leur tête est revenue au bout de quinze jours ; le tonnerre les a tués ; dites à vos savants qu’ils m’expliquent cela.

7305. — À M. ***[2].
À Ferney, 27 juillet.

Ne jugez pas, monsieur, de ma sensibilité par le délai de ma réponse. Je suis quelquefois un malade assez gai ; mais quand mes souffrances redoublent, il n’y a plus moyen de badiner avec son vaisseau, ni de remercier aussitôt qu’on le voudrait ceux qui, comme vous, veulent bien lui souhaiter un bon voyage.

Je suis vieux : je fais quelques gambades sur le bord de mon tombeau, mais je ne peux pas toujours remplir mes devoirs ; c’en est un pour moi de vous dire combien vos vers sont agréables, et à quel point j’en suis reconnaissant.

J’ai l’honneur d’être, monsieur, votre dévoué serviteur.

de Voltaire.
7306. — À MADAME LA MARQUISE DU DEFFANT.
30 juillet.

Voici des thèmes, Dieu merci, madame. Vous savez que mon imagination est stérile quand elle n’est pas portée par un sujet, et que, malgré mon attachement de plus de quarante années, je suis muet quand on ne m’interroge pas. Je suis un vieux Polichinelle qui a besoin d’un compère.

Vous me dites que le président est à plaindre d’avoir quatre-vingts ans ; ce sont ses amis qui sont à plaindre. D’ailleurs

  1. Voyez tome XXVII, page 213, l’opuscule intitulé les Colimaçons du R. P. l’Escarbotier.
  2. Auteur des vers qui sont dans le Mercure de septembre 1768, pages 57-59 ; voyez tome X, page 395.