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roi de donner le privilège à Mme Calas de vendre une estampe[1]. J’ai déjà fait quelques souscriptions dans ma retraite, et M. Tronchin en a fait bien davantage, comme de raison. Je plains bien mes pauvres Sirven. Malheur à tous ceux qui viennent les derniers, dans quelque genre que ce puisse être ! l’attention du public n’est plus pour eux. Il faudrait à présent avoir eu deux hommes roués dans sa famille pour faire quelque éclat dans le monde.

Je m’imagine que l’affaire des dîmes sera décidée à Fontainebleau[2]. Il en est de cette besogne comme de celle de l’ex-jésuite ; il n’importe en quel temps elles finissent, pourvu que mes anges et M. le duc de Praslin les favorisent toutes deux.

Tout ce qui est dans ma petite retraite se met au bout des ailes de mes anges.


6108. — À MADEMOISELLE CLAIRON.
16 septembre.

Mes yeux, mademoiselle, ne sont pas si heureux à présent qu’ils l’étaient quand ils avaient le bonheur de vous voir. Ils pouvaient alors le disputer à mes oreilles ; mais actuellement ils sont si malades que je ne peux avoir l’honneur de vous écrire de ma main.

Nous m’ordonnez de vous écrire à Aix ; cela me fait craindre que vous n’ayez pas reçu la lettre que je vous écrivis à Marseille[3]. Je vous y rendais compte de l’empressement de M. le maréchal de Richelieu à savoir des nouvelles de votre santé. Le roi s’en était informé lui-même. Je vous confiais que j’avais instruit M. le maréchal de Richelieu de la vérité ; je lui disais que vous vous étiez trouvée fort mal de l’effort que vous aviez fait de représenter Électre et Aménaïde sur mon petit théâtre, et que M. Tronchin avait déclaré qu’il y allait de votre vie ; mais que vous ne balanceriez pas de la risquer quand il s’agirait de plaire au roi. Si ma première lettre est perdu, celle-ci servira de supplément.

L’amitié que vous me témoignez me fait encore plus de plaisir que les talents inimitables que je vous ai vue déployer. Je m’intéresse à votre bonheur autant qu’à votre gloire. Vous ferez les

  1. Voyez les lettres 6088 et 6096.
  2. Voltaire finit par transiger avec son curé.
  3. La lettre 6100.