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ANNÉE 1766.

trompé, et se trompe-t-il quand il pense que ce mémoire irritera des hommes considérables ? Ô Welches ! sans tous ces orages, votre pays serait un joli pays. Respect et tendresse.


6448. — À M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU[1].
À Ferney, 6 auguste.

Voici, monseigneur, celui qui vous fera des ponts, des chaussées, de beaux grands chemins, l’ingénieur en chef de votre royaume d’Aquitaine. Il passe de nos déserts à Bordeaux. Je crois qu’il méritera votre protection, car il est expéditif ; ne trouvant rien de difficile, dénichant toutes les filles d’un pays, utile dans les travaux, utile dans les plaisirs, fait pour vous servir. Heureux ceux qui ont l’honneur de vous approcher ! Je m’imagine que je ne suis triste et malingre que parce que je ne suis pas auprès de vous. D’ailleurs on ne m’a mandé de Paris, depuis quelques mois, que des choses qui font bondir le cœur et qui arrachent des larmes.

Vivez heureux, brillant, aimé, honoré ; jouissez de tout, conservez-moi vos bontés, et je serai consolé de mon existence. Je suis à présent le doyen de vos courtisans et de vos attachés, aussi dévoué que le premier jour et rempli pour vous du plus tendre respect.


6449. — À M. D’ALEMBERT.
7 auguste.

Vous pensez bien, mon vrai philosophe, que mon sang a bouilli quand j’ai lu ce mémoire[2] écrit avec un cure-dent ; ce cure-dent grave pour l’immortalité. Malheur à qui la lecture de cet écrit ne donne pas la fièvre ! Il doit au moins faire mourir d’apoplexie le…, et le…, et le… N’admirez-vous pas les sobriquets que le sot peuple donne à de certaines gens ? C’est donc de tous les côtés à qui se couvrira d’horreur et d’infamie. Je vous plains d’être où vous êtes. Vous pouvez me dire : « Ubicumque calculum ponas, ibi naufragium invenies[3]. »

Vous avez des liens, des pensions, vous êtes enchaîné ; pour moi, je mourrai bientôt, et ce sera en détestant le pays des

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Mémoires de M. de La Chalolais, procureur général au parlement de Bretagne, in-12 de 80 pages, contenant deux mémoires.
  3. On a donné le texte de Pétrone, tome XXXIV, page 28.