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ANNÉE 1766.

est-ce que vous en avez trouvé de raboteux ? — Je ne dis pas cela ; mais je vous dis que je ne peux souffrir ni un vers disloqué, ni un vers faible, ni une pensée inutile, ni rien qui m’arrête à la lecture : il faut vite transcrire votre ouvrage, afin que j’en juge à tête reposée. — On le transcrira, madame ; mais le copiste est actuellement malade, il faudra attendre quelque temps. — Tant mieux, monsieur ; car, dans cet intervalle, il vient toujours quelque idée. Je vous répète qu’il faut que la diction soit parfaite, sans quoi on ne plaît jamais aux connaisseurs. Quand votre pièce sera bien finie et bien copiée, vous l’enverrez à vos anges, qui l’éplucheront encore. — Je vous assure, madame, que je n’y manquerai pas. »

Pendant cette conversation, M. de Chabanon, de son côté, mettait son plan au net ; et M. de La Harpe viendra bientôt faire aussi son plan. Nous attendons aujourd’hui M. de Beauteville avec un autre plan ; c’est celui de rendre sages les Genevois. Ce qui est bien sûr, c’est que la pièce finira comme M. le duc de Praslin voudra.

Vous ne me dites rien, mes divins anges, de la pièce[1] que le roi a jouée au parlement : elle réussit beaucoup dans l’Europe. Je baise le bout de vos ailes plus que jamais.


6296. — À M. DAMILAVILLE.
19 mars.

M. Delaleu, mon cher ami, vous donnera tout ce que vous prescrirez. J’attends avec mon impatience ordinaire cette estampe et le mémoire de notre prophète Élie : il est sans doute signé de plusieurs avocats, dont il faut payer la consultation. Vous êtes le seul qui vouliez bien rendre ces services essentiels à la philosophie. Daignez donc donner à M. de Beaumont ce qu’il faudra : vous ferez prendre ce qui sera nécessaire chez M. Delaleu.

Ô que j’aime votre philosophie agissante et bienfaisante ! Il y a dans le discours de M. de Castilhon[2] un bel éloge de cette vraie philosophie qu’il rend compatible avec la religion, ainsi qu’il le devait faire dans un discours public. Le roi de Prusse mande[3] que, sur mille hommes, on ne trouve qu’un philosophe ; mais il

  1. Le discours du roi au parlement, du 3 mars 1766.
  2. Voyez la note 2, page 104.
  3. Voyez lettre 6275.