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de me faire connaître à lui, et de lui dire combien je l’estime, vvous me rendrez une exacte justice.

Je ne chercherai point à faire valoir mes petits services ni auprès des magistrats, ni auprès des citoyens ; c’est assez pour moi de les avoir fait dîner ensemble à deux lieues de Genève ; il faut que M. Hennin fasse le reste, et qu’il en ait tout l’honneur. Tout ce que je désire, c’est que M. le duc de Praslin me regarde comme un petit anti-Jean-Jacques, et comme un homme qui n’est pas venu apporter le glaive, mais la paix[1]. Cela est un peu contre la maxime de l’Évangile ; cependant cela est fort chrétien.

Vous ne sauriez croire, mes divins anges, à quel point je suis pénétré de toutes vos bontés. Vous me permettez de vous faire part de toutes mes idées, vous avez daigné vous intéresser à mon petit mémoire sur Genève, vous me ménagez la bienveillance de M. le duc de Praslin, vous avez la patience d’attendre que le petit ex-jésuite travaille à son ouvrage ; enfin votre indulgence me transporte. Je souhaite passionnément que les parlements puissent avoir le crédit de soutenir dans ce moment-ci les lois, la nation, et la vérité contre les prêtres ; ils ont eu des torts sans doute, mais il ne faut pas punir la France entière de leurs fautes. Vive l’impératrice de Russie ! vive Catherine, qui a réduit tout son clergé à ne vivre que de ses gages, et à ne pouvoir nuire !

Toute ma petite famille baise les ailes de mes anges comme moi-même.


6187. — À M. BEAUMONT-JACOB[2].
À Ferney, 14 décembre.

J’ai l’honneur de vous renvoyer, monsieur, la liste de la loterie que vous avez eu la bonté de me prêter.

Je vous supplierai de vouloir bien, à votre loisir, mander à vos correspondants de Paris de faire porter chez M. de La Borde, banquier du roi, mes trente-six billets de loterie, y compris les billets qui ont gagné les lots. M. de La Borde aura la bonté de joindre cette petite parcelle aux billets dont il a bien voulu se charger pour moi, et la petite masse sera réunie à la grande. Quand cette opération sera faite, je serais bien aise que vous voulussiez me faire savoir ce qui vous restera entre les mains.

  1. C’est l’inverse de ce qu’on lit dans saint Matthieu, x, 34 : « Non veni pacem mittere, sed gladium. »
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.