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Cette version est sans doute la meilleure[1] ; des cartons ne sont pas une chose bien difficile, et il faut les préférer à des négligences insupportables.

Je fais mille remerciements à M. Lekain.

Je ne crois pas qu’il y ait eu des spectacles à Paris pendant les prières de quarante heures. S’il y a quelque chose de nouveau, je le supplie de vouloir bien en faire part à son ami V.


6163. — DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
Sans-Souci, 25 novembre[2].

Cet Extrait du Dictionnaire de Bayle[3], dont vous me parlez, est de moi. Je m’y étais occupé dans un temps où j’avais beaucoup d’affaires : l’édition s’en est ressentie. On en prépare à présent une nouvelle, où les articles des courtisanes seront remplacés par ceux d’Ovide et de Lucrèce, et dans laquelle on restituera le bon article de David.

Je vous envoie, comme vous le souhaitez, cet extrait informe, et qui ne répond point à mon dessein. Il sera suivi de la nouvelle édition, dès qu’elle sera achevée. Mais ce ne sont que de légères chiquenaudes que j’applique[4] sur le nez de l’inf… ; il n’est donné qu’à vous de l’écraser.

Cette inf… a eu le sort des catins. Elle a été honorée tant qu’elle était jeune : à présent, dans la décrépitude, chacun l’insulte. Le marquis d’Argens l’a assez maltraitée dans son Julien[5]. Cet ouvrage est moins incorrect que les autres[6], cependant je n’ai pas été content de la sortie qu’il a faite à propos de rien contre Maupertuis. Il ne faut point troubler la cendre des morts. Quelle gloire y a-t-il de combattre un homme que la mort a désarmé ? Maupertuis sans doute a fait un mauvais ouvrage ; c’est une plaisanterie gravement écrite. Il aurait dû l’égayer, pour que personne ne put s’y tromper. Vous prîtes la chose au tragique ; vous attaquâtes sérieusement[7] un badinage, et avec votre redoutable massue d’Hercule vous écrasâtes un moucheron.

Pour moi, qui voulais conserver la paix dans la maison, je fis tout ce que je pus pour vous empêcher d’éclater. Malgré tout ce que je vous disais,

  1. C’est celle qui est tome III, page 110.
  2. Cette lettre, classée jusqu’ici à l’année 1766, est du 25 novembre 1765 ; elle est la réponse à une lettre de Voltaire, du 16 octobre de la même année, qui est perdue.
  3. Voyez la note 1, page 202.
  4. « Sur le nez du fanatisme ; il n’est, donné qu’à vous de l’écraser. Il a eu le sort des catins. » (Édit. de Berlin)
  5. C’est-à-dire dans la Défense du paganisme, 1764, in-12 ; voyez l’Avertissement tome XXVIII, pape 1.
  6. « Que ses autres production. » (Édit. de Berlin.)
  7. Voltaire n’attaqua Maupertuis que par des plaisanteries ; mais il les poussa loin ; voyez l’Histoire du docteur Akakia, tome XXIII, pages 559-583.