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couragent pas, vous entendrez parler de moi l’année prochaine.

Laissons là Icile, je vous en supplie ; c’est un point sur un i. Ne me parlez point d’une engelure, quand le renvoi de Julie dans sa chambre me donne la fièvre double tierce.

Le Corneille est entièrement fini depuis longtemps ; on l’aura probablement sur la fin de janvier. La petite-nièce à Pierre avance dans sa grossesse, tantôt chantant, tantôt souffrant. Notre petite famille est composée d’elle, de son mari, d’une sœur, et d’un jésuite ; voilà un plaisant assemblage ; c’est une colonie à faire pouffer de rire. Je souhaite que celle de M. le duc de Choiseul, à la Guyane (qui est, ne vous déplaise, le pays d’Eldorado[1]), soit aussi unie et aussi gaie. La nôtre se met toujours à l’ombre de vos ailes, et je vous adore du culte d’hyperdulie ; et si les roués réussissent, j’irai jusqu’à latrie. Mettez-moi, je vous en conjure, aux pieds de M. le duc de Praslin pour l’année prochaine, et pour toutes celles où je pourrai exister.


5484. — À M. D’ALEMBERT.
15 décembre.

Mon très-aimable philosophe, c’est pour vous dire que l’ouvrage du saint prêtre sur la Tolérance ayant été très-toléré des ministres et des personnes plus que ministres[2], et ayant même été jugé fort édifiant, quoiqu’il y ait peut-être quelques endroits dont les faibles pourraient se scandaliser, il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous, mon cher frère, de vous supplier de donner une saccade et un coup d’éperon au cheval qui a rué[3] contre la Tolérance, et qui l’a empêchée d’entrer en France par Lyon. Figurez-vous que ce ballot est actuellement sur l’avare mer, exposé à être pris par les Numides, avec qui nous sommes en guerre. Si votre ami M. Bourgelat avait un mors de votre façon, son allure deviendrait plus aisée. Les frères Cramer feraient au plus vite une nouvelle édition, qu’ils enverraient en la cité de Lyon en guise d’un ballot de soie, et les fidèles jouiraient bientôt de l’œuvre honnête dont ils sont privés. Dieu sait quand vous recevrez votre exemplaire.

Je vous demande en grâce de m’envoyer copie de la lettre dont vous avez honoré Jean-George. Vous savez qu’on a imprimé

  1. Voyez tome XXI, page 172.
  2. Mmes de Pompadour et de Grammont ; voyez page 30.
  3. Voyez la lettre 5482, in fine.