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tumée à cette espèce d’harmonie. Je prends d’ailleurs actuellement peu d’intérêt aux vers, soit anciens, soit modernes : je suis vieux, faible, malade.


Nunc itaque et versus ef cætera ludicra pono.

(Hor., lib. I, ep. i, v. 10.)

Je n’en dis pas de même de votre amitié et de l’envie de vous voir : ce sont deux choses pour lesquelles je me sens toute la vivacité de la jeunesse.

J’ai l’honneur d’être, monsieur, du meilleur de mon cœur, et et sans cérémonie, votre très-humble et très-obéissant serviteur.


5893. — À M. D’ALEMBERT.
25 janvier.

Vous devez, mon cher philosophe, avoir reçu une lettre satisfaisante de ce joufflu de Gabriel Cramer. Il est bien heureux d’imprimer la Destruction : cette Destruction suffirait pour bien établir un libraire de Paris. La quatrième feuille est déjà imprimée. Je vous remercie de m’avoir fourré là[1], j’en suis tout glorieux. Je me trouve enchâssé avec des diamants que vous avez répandus sur le fumier des jansénistes et des molinistes.

Votre ami le roi de Prusse, à qui j’ai été obligé d’écrire, m’a félicité[2] d’être toujours occupé à écraser l’inf… Hélas ! je ne l’écrase pas, mais vous la percez de cent petits traits dont elle ne se relèvera jamais chez les honnêtes gens. Le bon de l’affaire, c’est qu’étant percée à jour de votre main forte et adroite, elle n’osera pas seulement se plaindre.

Je vais faire partir mon exemplaire de Corneille pour l’Académie. Gabriel m’en rendra un de la seconde édition.

Vous voilà en train de détruire, amusez-vous à détruire successivement toutes nos sottises welches ; un destructeur tel que vous sera un fondateur de la raison.

  1. Dans la première édition de l’ouvrage de d’Alembert, Sur la Destruction des jésuites en France, c’est dans la quatrième feuille, page 84, que se trouve le passage où est, loué « le chapitre sur le jansénisme dans l’excellent Essai sur l’Histoire générale, par le plus agréable de nos écrivains philosophes ». Ce chapitre est xxxviie du Siècle de Louis XIV ; voyez tome XV, page 39.
  2. Lettre 5865.