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Middleton, traduit mot pour mot. Enfer, Christianisme, sont traduits de milord Warburton, évêque de Glocester. Apocalypse est un extrait du manuscrit curieux de M. Abauzit, l’un des plus savants hommes de l’Europe, et des plus modestes ; mais l’extrait est très-mal fait. Messie est tout entier du premier pasteur de l’église de Lausanne, nommé M. Polier de Bottens, homme de condition et de beaucoup de mérite, qui envoya cet article aux encyclopédistes il y a quelques années. Cet article me paraît savant et bien fait. J’ai obtenu depuis peu qu’on m’envoyât l’original écrit de sa main, que je possède.

Ainsi vous voyez, mon cher et illustre confrère, que l’ouvrage n’est pas de moi ; mais il faudra toujours que les gens de lettres soient persécutés par la calomnie : c’est leur partage, c’est leur récompense.

Je pourrais, si je voulais, me plaindre qu’à l’âge de soixante-onze ans, accablé d’infirmités, et presque aveugle, on ne veuille pas me laisser achever ma carrière en paix ; mais je ne suis pas assez sot pour me plaindre, et j’aime mieux rire jusqu’au bout des vains efforts de la clique des Patouillet et des Fréron. Vos bontés me les font oublier, mon aimable et illustre confrère ; et quand je suis toujours un peu aimé du seul homme qui ait appris aux Français leur histoire, je me rengorge, et je suis toujours fier dans mes déserts.

Vivez, poussez votre carrière aussi loin que Fontenelle ; et quand je serai mort, dites : J’ai perdu un admirateur.


5800. — À M. DUCLOS.
Aux Délices, 20 octobre.

Mon cher et illustre confrère, la calomnie persécutera donc toujours ces malheureux philosophes ! On s’obstine à m’imputer dans Paris et à Versailles je ne sais quelle rapsodie, intitulée Dictionnaire philosophique portatif, qu’assurément on ne m’attribue pas dans Genève. On sait assez que c’est un recueil de diverses pièces, dont quelques-unes sont du rabbinisme. On y connaît les auteurs de divers articles : on m’a même communiqué depuis peu les originaux de quelques-unes de ces dissertations écrites de la main de leurs auteurs. On ne peut avoir une justification plus complète. Je crois devoir à l’Académie cette protestation que je fais entre vos mains. Je me flatte que mes confrères me rendront justice. Je pourrais me lamenter sur la persécution