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5634. — À M. LE MARQUIS D’ARGENCE DE DIRAC[1].
Le 3 mai.

Mon cher frère, j’ai été très-édifié des réflexions philosophiques ; on ne peut mieux s’y prendre pour préparer les esprits. Le livre contre lequel ces réflexions sont écrites est bafoué à Paris du petit nombre de lecteurs qui ont pu en parcourir quelques pages, et est ignoré de tout le reste.

Je me flatte que la santé de vos amis est devenue meilleure, et que les trois cents pilules[2] de Tronchin font un merveilleux effet. C’est un remède souverain contre ces sortes de maladies. Vous devenez un très-grand médecin. Il est vrai que ce remède n’est pas fait pour la populace, qui a un très-mauvais régime ; mais il réussit beaucoup chez les gens qui savent un peu se gouverner eux-mêmes.

Je vous demande pardon de ne vous avoir pas accusé la réception de la dinde ; elle est venue un peu tard, et on n’a point entendu parler de perdrix.

Il y a trop loin d’ici à Angoulême ; j’en suis bien fâché, car je voudrais bien vous embrasser avant de mourir.


5635. — À M. LE MARQUIS ALBERGATI CAPACELLI[3].
Aux Délices, 3 mai.

Si j’avais de la santé et des yeux, monsieur, je vous aurais répondu plus tôt ; si j’étais jeune, je viendrais sûrement vous voir, vous embrasser, admirer vos talents, être témoin de la protection que vous donnez aux arts, et partager vos plaisirs. Une si grande satisfaction n’est pas faite pour la fin de ma vie ; je suis réduit à pouvoir à peine dicter une lettre.

Oserai-je vous supplier de vouloir bien faire mes compliments à MM. Fabri et Paradisi[4], à qui je dois autant de reconnaissance que de rimes ?

Je suis toujours étonné que vous ayez traduit la tragédie d’Idomènèe[5]. Il me semble qu’un bon peintre comme vous ne

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Trois cents exemplaires des Sentiments de Meslier.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.
  4. Traducteurs de quelques tragédies de Voltaire.
  5. De Crébillon.