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mot peut quelquefois causer un grand mal. Cette même particule, très-mal expliquée par M. de Silhouette dans le traité d’Utrecht, a causé la dernière guerre, dans laquelle nous avons perdu le Canada. Je ne perdrais pas même Ferney, car je l’ai donné à ma nièce ; mais malgré mon juste ressentiment contre l’infâme condamnation de la Loi naturelle[1] je fis jeter au feu cette feuille ; je mis à la place : « Ces émotions furent bientôt ensevelies dans une consternation générale, par l’accident le plus imprévu et le plus effroyable : le roi fut assassiné, le 5 de janvier, dans la cour de Versailles, etc. »

J’ai inséré même des choses trop flatteuses pour le parlement dans la même feuille ; et je dis expressément : « Le parlement faisait voir qu’il n’avait en vue que le bien de l’État, et qu’il croyait que son devoir n’était pas de plaire, mais de servir. » En un mot, j’ai tourné les choses de manière que, sans blesser la vérité, j’ai tâché de ne déplaire à personne. D’ailleurs, dans toute l’histoire de Damiens, je me borne uniquement à citer les interrogatoires. Au reste, l’ouvrage n’est pas encore achevé d’imprimer.

Ce dimanche 6, Sexagésime, nous venons de fiancer nos futurs ; de là je conclus qu’il faut que François se presse.

Voici, mes anges, une lettre de M. Dupuits, par laquelle il vous remercie de toutes vos bontés.

Je me prosterne devant mes deux anges gardiens.


5179. — À M. DEBRUS[2].

J’ai l’honneur de renvoyer à M. Debrus la lettre à M. Dumas, et j’ai pris la liberté d’ajouter quelques mots. Je ne sais point la demeure du fils de M. Lavaysse. Je supplie M. Debrus de lui faire parvenir ma réponse.

Une personne très-instruite m’a mandé qu’elle ne doutait pas que l’affaire ne fût renvoyée au conseil. Nous avons, en ce cas, tout lieu d’espérer que le sieur David sera au moins réprimandé, et peut-être condamné à payer les frais du procès si on l’attaque personnellement.

On me mande qu’il sera indispensable de faire paraître Pierre Calas, Lavaysse et la servante, et qu’il ne faudrait pas que cette servante eût demeuré chez moi, parce que malheureusement on

  1. La condamnation est du 6 février 1759.
  2. Éditeur, A. Coquerel.