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5152. — À M. ÉLIE DE BEAUMONT.
À Ferney. 21 janvier.

Notre ami commun M. Damilaville m’avait envoyé, monsieur, votre très-beau et très-solide discours, et je ne croyais pas l’avoir. Le titre m’avait trompé ; je viens enfin de m’apercevoir de mon erreur. J’ai vu votre nom à la trente-cinquième page, et je vous ai lu avec un plaisir extrême. Tout célibataire que je suis, j’avoue que vous faites très-bien de prêcher le mariage ; je suis aussi fort de votre avis sur les défrichements. Je me suis avisé de défricher, ne m’étant pas avisé de peupler ; mais voici comme je m’y suis pris. J’ai assemblé les propriétaires des terres abandonnées, et je leur ai dit : Mes amis, je vais défricher à mes frais, et quand la terre sera en valeur, nous partagerons.

Je n’ai point fait de citoyens, mais j’ai fait de la terre.

Je me flatte, monsieur, que vous serez célèbre pour avoir fait une bien meilleure action, pour avoir fait rendre justice à l’innocence opprimée et rouée[1]. Vous avez vu, sans doute, la lettre de la religieuse de Toulouse ; elle me paraît importante, et je vois avec plaisir que les sœurs de la Visitation n’ont pas le cœur si dur que messieurs. J’espère que le conseil pensera comme la dame de la Visitation.

Si vous voyez M. de Cideville, je vous prie de lui dire combien je l’aime. C’est un sentiment que vos ouvrages m’inspirent pour vous, qui se joint bien naturellement à l’estime infinie avec laquelle j’ai l’honneur d’être, etc.


5153. — À M. COLINI.
21 janvier.

J’ai reçu votre Palatinat[2], mon cher historiographe ; me voilà au fait, grâce à vos recherches, de bien des choses que j’ignorais. Les palatins vous auront obligation.

Nous sommes ici dans les neiges jusqu’au cou ; cela gèle l’imagination d’un pauvre malade d’environ soixante-dix ans, et je n’ose écrire à monseigneur l’électeur, de peur de l’ennuyer.

Vous avez probablement reçu le petit paquet que je vous ai adressé. Je vous embrasse de tout mon cœur.

  1. À la famille Calas.
  2. Précis de l’Histoire du Palatinat du Rhin, 1763, in-8o.