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5032. — À M. FYOT DE LA MARCHE[1].
Aux Délices, 8 septembre 1762.

Voilà le mois de septembre venu, monsieur, et je voudrais déjà être à la Marche ; mais une descente de pairs du royaume et une fluxion sur les yeux et sur les oreilles me retiendront aux Délices probablement jusqu’à la fin du mois. M. le duc de Villars est ici ; nous attendons M. le duc de Richelieu ; Mme Denis et Mlle Corneille répètent leurs rôles, et moi, je ne joue que celui de malade. Dieu me fasse la grâce de pouvoir, à la fin du mois, venir me réjouir avec vous de la paix que nous allons avoir avec les Anglais et de celle que probablement votre parlement aura avec le conseil !

Je suis fort content, malgré les critiques de l’estampe d’Othon que M. Le Monier[2] m’envoie. Je vous renouvelle mes remerciements, et je vous prie de permettre que j’insère ce petit billet dans ce paquet. Pardonnez à un pauvre homme, moitié sourd, moitié aveugle, s’il vous écrit si laconiquement ; vous savez combien il serait bavard s’il vous disait à quel point il est pénétré pour vous d’attachement et de respect. V.


5033. — DE M. D’ALEMBERT.
À Paris, 8 septembre.

L’Académie m’a chargé, mon cher confrère, en l’absence de M. Duclos, de vous remercier de la traduction que vous lui avez envoyée du Jules César de Shakespeare. Elle l’a lue avec plaisir, et elle pense que vous avez très-bien fait de relever par ce parallèle le mérite de notre théâtre. Elle s’en rapporte à vous pour la fidélité de la traduction, n’ayant pas eu d’ailleurs l’original sous les yeux. Elle est étonnée qu’une nation qui n’est pas barbare puisse applaudir à des rapsodies si grossières ; et rien ne lui paraît plus propre, comme vous l’avez très-bien pensé, à assurer la gloire de Corneille.

Après m’être acquitté des ordres de l’Académie, voici maintenant pour mon compte. Quelque absurde que me paraisse la pièce de Shakespeare, quelque grossiers que soient réellement les personnages, quelque fidélité que je pense que vous ayez mise dans votre traduction, j’ai peine à croire qu’en certains endroits l’original soit aussi mauvais qu’il le paraît dans cette traduction. Il y a un endroit, par exemple, où vous faites dire à un des ac-

  1. Éditeur, Th. Foisset.
  2. Lisez : Monnier.