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coquin, et Lefranc un impertinent. Les pauvretés de la littérature n’empêchent pas que M. le maréchal de Broglie ne soit dans Cassel.

Abraham Chaumeix, Jean Gauchat, Martin[1] Trublet, ne m’empêcheront pas de donner un beau feu d’artifice à la fin de la campagne.

Mon cher ami, il faut que le roi sache que les philosophes lui sont plus attachés que les fanatiques et les hypocrites de son royaume : l’univers n’en saura rien ; l’univers n’est fait que pour Pompignan. Je vous écris cette lettre en droiture, parce que M. Bouret ne m’a offert ses bons offices que pour de gros paquets. Mandez-nous, je vous prie, par qui l’on peut vous sauver dorénavant de l’impôt d’une lettre ; dites-moi avec quelle noble fierté l’ami Fréron reçoit le fouet et la fleur de lis qu’on lui donne trois fois par semaine[2] à la Comédie ; donnez-nous des nouvelles surtout de votre situation, de vos desseins, et de vos espérances ; l’oncle et la nièce s’intéressent également à vous. Présentez mes respects, je vous prie, à Mme Geoffrin[3]. Si vous voyez M. Duclos, dites-lui, je vous prie, combien je l’estime, et à quel point je lui suis attaché ; mais surtout soyez bien persuadé que vous aurez toujours dans l’oncle et dans la nièce deux amis essentiels.

Est-il possible qu’il y ait encore quelqu’un qui reçoive Fréron chez lui ? Ce chien, fessé dans la rue, peut-il trouver d’autre asile que celui qu’il s’est bâti avec ses feuilles ? Est-il vrai qu’il est brouillé avec Palissot, et que la discorde est dans le camp des ennemis ? Contribuez de tout votre pouvoir à écraser les méchants et la méchanceté, les hypocrites et l’hypocrisie ; ayez la charité de nous mander tout ce que vous saurez de ces garnements. Mais, comme il faut mêler l’agréable à l’utile, parlez-moi de Melpomène Clairon.

Que fait-elle ? que dit-elle ? que jouera-t-elle ? Lui a-t-on lu


· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · d’une voix fausse et grêle,
Le triste drame écrit pour la Denèle ?

(Le Pauvre Diable, v. 135.)

Quelque chose qu’elle joue, ce sera un beau tapage quand elle reparaîtra sur la scène. Adieu ; si vous avez envie de faire

  1. Ce prénom, comme celui de Jean donné à Gauchat, sont de l’invention de Voltaire, qui dit à Linant dans la lettre 4192:« Il y a tant de gens à la foire qui s’appellent Martin ! »
  2. On jouait l’Écossaise trois fois par semaine ; voyez la lettre 4214.
  3. Voyez une note sur la lettre du 21 mai 1764 qui lui est adressée.