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Je compte avoir l’honneur, monsieur, de vous envoyer, par la première occasion, un nouveau tome de l’Histoire universelle, que je publie expressément pour condamner les deux premiers que l’on a si indignement défigurés, et que j’espère donuer moi-même, quand il en sera temps.

La vérité, quelque circonspecte qu’elle puisse être, a besoin de la liberté ; si je peux venir à bout de goûter les charmes de l’une et de l’autre avec ceux de votre société, je croirai ne pouvoir mieux finir ma carrière. Je supplie les deux nouveaux mariés de me conserver leurs bontés, et de compter sur mes respectueux sentiments.


Voltaire.

2781. — À FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE[1].
Colmar, 22 août 1754.

Sire, je prends encore la liberté de présenter à Votre Majesté un ouvrage[2] qui, si vous daignez l’honorer d’un de vos regards, vous ferait voir que ma vie est consacrée au travail et à la vérité. Cette vie, toujours retirée et toujours occupée au milieu des maladies, et ma conduite jusqu’à ma mort, vous prouveront que mon caractère n’est pas indigne des bontés dont vous m’avez honoré pendant quinze années.

J’attends encore de la générosité de votre âme que vous ne voudrez pas remplir mes derniers jours d’amertume.

Je vous conjure de vous souvenir que j’avais perdu mes emplois pour avoir l’honneur d’être auprès de vous, et que je ne le regrette pas ; que je vous ai donné mon temps et mes soins pendant trois ans ; que je renonçai à tout pour vous, et que je n’ai jamais manqué à votre personne.

Ma nièce, qui n’a été malheureuse que par vous, et qui certainement ne mérite pas de l’être, qui console ma vieillesse, et qui veut bien prendre soin de ma malheureuse santé et des biens que j’ai auprès de Colmar, doit au moins être un objet de votre bonté et de votre justice.

Elle est encore malade de l’aventure affreuse qu’elle essuya en votre nom. Je me flatte toujours que vous daignerez réparer par quelques mots de bonté des choses qui sont si contraires à

  1. Œuvres de Frédéric le Grand, Berlin, 1853, tome XXIII, page 5. — Cette lettre est tirée des archives du Cabinet de Berlin.
  2. Probablement l’Orphelin de la Chine.