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à lui et à toute sa famille de marcher dans la voie du Seigneur, et de faire jugement et justice. Dieu dit donc : La clameur des Sodomites et de Gomorrhe s’est multipliée, et le péché s’est appesanti. Je descendrai donc pour voir, et je verrai si la clameur, qui est venue à moi, est égalée par leurs œuvres, pour savoir si cela est, ou si cela n’est pas. Et ils partirent de là, et ils s’en allèrent à Sodome : mais Abraham resta encore avec Dieu, et, s’approchant de lui, il lui dit : Est-ce que tu perdras le juste avec l’impie ? S’il y avait cinquante justes dans la cité, périront-ils aussi ? Et ne pardonneras-tu pas à la ville à cause de ces cinquante justes ? … Dieu lui dit : Si je trouve dans Sodome cinquante justes, je pardonnerai pour l’amour d’eux… Et Abraham répliqua : S’il manque cinq de cinquante justes, détruiras-tu la ville pour ces cinq-là ? Et Dieu répondit : Je ne la détruirai point si j’en trouve quarante-cinq ; et Abraham continua : Peut-être ne s’en trouvera-t-il que quarante… Dieu répondit : Je ne la détruirai point, pour l’amour de ces quarante… Abraham dit : Et trente ? Dieu répondit : Je ne la détruirai point si j’en trouve trente… Et vingt ? … Et dix… — Je ne la détruirai point s’il y en a dix… Et Dieu se retira après cet entretien, et Abraham se retira chez lui.

Sur le soir les deux anges vinrent à Sodome ; et Loth, assis aux portes de la ville, les ayant vus, se leva, les salua, prosterné en terre, et leur dit : Messieurs, passez dans la maison de votre serviteur, demeurez-y, lavez vos pieds, et demain vous passerez votre chemin ; et ils lui dirent : Non, mais nous resterons dans la rue. Loth les pressa instamment, et les obligea de venir chez lui. Il leur fit à souper, cuisit des azymes, et ils mangèrent.

Mais, avant qu’ils allassent coucher, les gens de la ville, les hommes de Sodome, environnèrent la maison, depuis le plus jeune jusqu’au plus vieux, depuis un bout jusqu’à l’autre, et ils appelèrent Loth, et lui dirent : Où sont ces gens qui sont entrés chez toi cette nuit ? Amène-les-nous, afin que nous en usions. Loth étant sorti vers eux, et fermant la porte derrière lui, leur dit : Je vous prie, mes frères, ne faites point ce mal ; j’ai deux filles qui n’ont point connu d’homme, je vous les amènerai : abusez d’elles tout comme il vous plaira ; mais ne faites point de mal à ces deux hommes, car ils sont venus à l’ombre de mon toit : mais ils lui dirent : Retire-toi de là[1], ; cet étranger est-il

    lisons donc point l’Écriture dans la vaine espérance de l’entendre parfaitement, mais dans la ferme résolution de la vénérer, en n’y entendant pas plus que les commentateurs. (Note de Voltaire.)

  1. Nous avouons que le texte confond ici plus qu’ailleurs l’esprit humain. Si