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multitude des juifs, qui revint dans la terre promise, se montait à quarante-deux mille trois cents soixante personnes ; et il compte toutes les familles, et le nombre de chaque famille pour plus grande exactitude. Cependant, quand on a additionné le tout, on ne trouve que vingt-neuf mille huit cents dix-huit ames. Il y a loin de ce calcul à celui d’environ trois millions d’hébreux qui s’enfuirent d’égypte, et qui vécurent de la rosée de manne dans le désert. Pour comble, le dénombrement de Néhémie est tout aussi erroné ; et c’est une chose assez extraordinaire de se tromper ainsi, en comptant si scrupuleusement le nombre de chaque famille. Les scribes, qui écrivirent, ne furent donc pas si bien inspirés qu’Esdras, qui dicta pendant neuf cents soixante heures sans reprendre haleine. Les critiques, dont nous avons tant parlé, élevent d’autres objections contre les livres d’Esdras. L’édit de Cyrus, qui permet aux juifs de rebâtir leur temple, ne leur paraît pas vraisemblable. Un roi de Perse, selon eux, n’a jamais pu dire, Adonaï le dieu du ciel m’a donné tous les royaumes de la terre, et m’a commandé de lui bâtir une maison dans Jérusalem, qui est en Judée . C’est précisément, selon eux, comme si le grand-turc disait : st Pierre et st Paul m’ont commandé de leur bâtir une chapelle dans Athenes qui est en Grece. Il n’est pas possible que Cyrus, dont la religion était si différente de celle des juifs, ait reconnu le dieu des juifs pour son dieu dans le préambule d’un édit. Il n’a pu dire : ce dieu m’a ordonné de lui bâtir un temple. Ce qui paraît plus vraisemblable, c’est que les juifs, esclaves chez les babyloniens, ayant trouvé grace devant le conquérant de Babylone, obtinrent, par des présents faits à propos aux grands de la Perse, une permission conçue en termes convenables. Les paroles suivantes de l’édit contredisent les premieres : que tout juif monte à Jérusalem qui est en Judée, et qu’il rebâtisse la maison d’Adonaï dieu d’Israël . Il n’est pas croyable que le nom d’Israël fût connu du conquérant Cyrus. et que tous les juifs habitants des autres lieux assistent ceux qui retourneront à Jérusalem, en or, en argent, en meubles, en bestiaux, outre ce qu’ils offrent volontairement au temple de Dieu, lequel est à Jérusalem.

on voit clairement, par ces paroles, que le petit nombre de juifs, qui revint dans la ville ; voulut être assisté par ceux qui n’y