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Ils firent donc ainsi, et prenant deux vaches qui allaitaient leurs veaux, ils les attelerent à la charrette, et enfermerent leurs veaux dans l’étable ; et ils mirent l’arche de Dieu sur la charrette, et le panier où étaient les rats d’or, et les figures de l’anus et du fondement…[1]. La charrette vint dans le champ de Josué de Betsamès et s’arrêta là. Et il y avait là une grande pierre… et ils couperent les bois de la charrette, et ils immolerent les deux vaches au seigneur en holocauste. Les lévites déposerent l’arche du seigneur et le panier sur la grande pierre ; et les gens de Betsamès offrirent des holocaustes, et immolerent des victimes au seigneur. … or le seigneur punit de mort ceux de Betsamès, parce qu’ils avaient vu l’arche du seigneur ; et il fit mourir soixante et dix hommes du peuple et cinquante mille de la populace[2]. Et le peuple pleura, parce que le seigneur avait frappé le peuple d’une si grande plaie… ils envoyerent donc aux habitants de Cariathiarim ; et ceux de Cariathiarim ramenerent l’arche du seigneur en Gabaa dans la maison d’Abinadab… et l’arche du seigneur demeura donc à Cariathiarim ; et elle

  1. les rats d’or et les anus d’or dans un panier sont les présents que les philistins font au dieu d’Israël leur ennemi. Les critiques prétendent qu’il n’est pas possible de forger une figure qui ressemble au trou qu’on nomme anus plus qu’à tout autre trou rond, et que ces figures ne pouvaient être que de petits cercles, de petits anneaux d’or. Mais qu’importe l’exactitude de la figure ? Un anus mal fait peut servir d’expiation tout aussi bien qu’un anus fait au tour. Il ne s’agit ici que d’une offrande qui marque le respect que le seigneur imposait aux vainqueurs-mêmes de son peuple.
  2. le célebre docteur Kennicot dit que l’évêque d’Oxford et lui sont bien revenus de leur préjugé en faveur du texte. Les juifs et les chrétiens , dit-il, ne se sont point fait scrupule d’exprimer leur répugnance à croire cette destruction de cinquante mille soixante et dix hommes . Le seigneur ne punit ses ennemis qu’en leur donnant une maladie dans la plus secrete partie des fesses , pour avoir pris son arche ; et il tue cinquante mille soixante et dix hommes de son propre peuple pour l’avoir regardée ! Une telle providence semble impénétrable. Nous avons déjà vu tant de milliers de ce peuple tués par ordre du seigneur, que nous ne devons plus nous étonner. Plusieurs savants ont soutenu que ces phrases hébraïques, Dieu les frappa, Dieu les fit mourir de mort, Dieu les arma, Dieu les conduisit, signifient simplement, ils moururent, ils s’armerent, ils allerent ; c’est ainsi que dans l’écriture un vent de Dieu veut dire un grand vent , une montagne de Dieu , une grande montagne . Mais cette explication ne résout pas la difficulté : on demande toujours, pourquoi ces cinquante mille soixante et dix hommes moururent subitement ? Calmet, il faut l’avouer, ne dit rien de satisfaisant. Convenons qu’il y a dans l’écriture bien des passages qu’il n’est pas donné aux hommes de comprendre : il est bon de nous humilier.