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ACTE III, SCÈNE IV. 349

De tous les vrais nomains, du séuat, de ton fils. Veux-tu vivre en eiïel le premier de la terre, Jouir d’un droit plus saint que celui de la guerre, Être encor plus que roi, plus même (jue César ?

CÉSAIÎ.

Eh bien ?

BRITUS.

Tu vois la terre enchaînée à ton char ; Romps nos fers, sois Romain, renonce au diadème.

CÉSAR,

Ah ! que proposes-tu ?

BRUTUS,

Ce qu’a fait Sylla même. Longtemps dans notre sang Sylla s’était noyé ; Il rendit Rome libre, et tout fut oublié. Cet assassin illustre, entouré de victimes. En descendant du trône effaça tous ses crimes, ïu n’eus point ses fureurs, ose avoir ses vertus. Ton cœur sut pardonner ; César, fais encor plus. Que servent désormais les grâces que tu donnes ? C’est à Rome, à l’État qu’il faut que tu pardonnes ; Alors, plus qu’à ton rang nos cœurs te sont soumis ; Alors tu sais régner ; alors je suis ton fils. Quoi ! je te parle en vain ?

CÉSAR.

Rome demande un maître ; Un jour à tes dépens tu l’apprendras peut-être. Tu vois nos citoyens plus puissants (|ue des rois : Nos mœurs changent, Rrutus ; il faut changer nos lois. La liberté n’est plus que le droit de se nuire : Rome, qui détruit tout, semble enfin se détruire. Ce colosse effrayant, dont le monde est foulé’, En pressant Tunivers, est lui-même ébranlé. Il penche vers sa chute, et contre la tempête Il demande mon bras pour soutenir sa tête-.

1. Les éditeurs de Kelil regardent ces vers comme imités de ceux qui sont dans Ériphijle, acte III, scène t.

2. Corneille, dans la Mort de Pompée, emploie une image semblable ; il dit que Pompée a espéré que l’Égypte,

Ayant sauvé le ciel, pourra sauver la terre, Et dans son désespoir à la fin se mêlant, Pourra prêter l’épaule au moude chancelant.