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ACTE II, SCÈNE III. 211

  • Poiir gouverner mon cœur, l’asservir, le changer,
  • Aviez-vous donc besoin d’un secours étranger ?
  • Aimez, il sufliia d’un mot de votre bouche.

AMÉLIE,

  • Je ne vous cache point que du soin qui me touche,
  • A votre ami, seigneur, mon cœur s’était remis ;
  • Je vois qu’il a plus fait qu’il ne m’avait promis.
  • Ayez pitié des pleurs que mes yeux lui confient :
  • Vous les laites couler, que vos mains les essuient.
  • Devenez assez grand pour apprendre à dompter
  • Des feux que mon devoir me force à rejeter.
  • Laissez-moi tout entière à la reconnaissance.

LE DUC,

  • Ainsi le seul Lisois a’votre confiance !
  • Mon outrage est connu ; je sais vos sentiments.

AxMÉLIE.

  • Vous les pourrez, seigneur, connaître avec le temps,
  • Mais vous n’aurez jamais le droit de les contraindre,
  • lVi de les condamner, ni même de vous plaindre.
  • Du généreux Lisois j’ai recherché l’appui :
  • Imitez sa grande âme, et pensez comme lui.

SCENE III.

LE DUC.

  • Eh bien ! c’en est donc fait ; l’ingrate, la parjure,
  • A mes yeux sans rougir étale mon injure :
  • De tant de trahisons l’abîme est découvert ;
  • Je n’avais qu’un ami, c’est lui seul qui me perd.
  • Amitié, vain fantôme, ombre que j’ai chérie,
  • Toi qui me consolais des malheurs de ma vie,
  • Bieh que j’ai trop aimé, que j’ai trop méconnu,
  • Trésor cherché sans cesse, et jamais obtenu !
  • Tu m’as trompé, cruelle, autant que l’amour même ;
  • Et maintenant, pour prix de mon erreur extrême,
  • Détrompé des faux biens, trop faits pour me charmer,
  • Mon destin me condamne à ne plus rien aimer.
  • Le voilà cet ingrat qui, fier de son parjure,
  • Vient encor de ses mains déchirer ma blessure.