Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/78

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rapporte aux Évangiles, il était plus éloigné de cette étrange prétention que la terre ne l’est du ciel. Il dit expressément avant d’être supplicié : « Je vais à mon père, qui est votre père, à mon Dieu, qui est votre Dieu[1]. »

Jamais Paul, tout ardent enthousiaste qu’il était, n’a parlé de Jésus que comme d’un homme choisi par Dieu même pour ramener les hommes à la justice.

Ni Jésus, ni aucun de ses apôtres, n’a dit qu’il eût deux natures et une personne avec deux volontés ; que sa mère fût mère de Dieu ; que son esprit fût la troisième personne de Dieu, et que cet esprit procédât du Père et du Fils. Si l’on trouve un seul de ces dogmes dans les quatre Évangiles, qu’on nous le montre ; qu’on ôte tout ce qui lui est étranger, tout ce qu’on lui a attribué en divers temps au milieu des disputes les plus scandaleuses et des conciles qui s’anathématisèrent les uns les autres avec tant de fureur, que reste-t-il en lui ? Un adorateur de Dieu qui a prêché la vertu, un ennemi des pharisiens, un juste, un théiste ; nous osons dire que nous sommes les seuls qui soient de sa religion, laquelle embrasse tout l’univers dans tous les temps, et qui par conséquent est la seule véritable.

que toutes les religions doivent respecter le théisme.

Après avoir jugé par la raison entre la sainte et éternelle religion du théisme et les autres religions si nouvelles, si inconstantes, si variables dans leurs dogmes contradictoires, si abandonnées aux superstitions, qu’on les juge par l’histoire et par les faits, on verra dans le seul christianisme plus de deux cents sectes différentes, qui crient toutes : « Mortels, achetez chez moi ; je suis la seule qui vend la vérité, les autres n’étalent que l’imposture. »

Depuis Constantin, on le sait assez, c’est une guerre perpétuelle entre les chrétiens ; tantôt bornée aux sophismes, aux fourberies, aux cabales, à la haine, et tantôt signalée par les carnages.

Le christianisme, tel qu’il est, et tel qu’il n’aurait pas dû être, se fonda sur les plus honteuses fraudes : sur cinquante évangiles apocryphes ; sur les constitutions apostoliques reconnues pour supposées ; sur des fausses lettres de Jésus, de Pilate, de Tibère, de Sénèque, de Paul ; sur les ridicules récognitions de Clément ;

  1. Jean, xx, 17. (Note de Voltaire.)