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XVI. — Et le prêtre lui dit [encore une fois] : Restituez la vierge que vous avez reçue du temple du Seigneur ; et Joseph fondait en larmes ; et le prêtre dit : Je vous ferai boire de l’eau de conviction[1] ; et votre péché sera manifesté devant vos yeux. Et le prêtre ayant pris de l’eau en fit boire à Joseph, et l’envoya dans les montagnes ; et il revint sain ; [il en fit aussi boire à Marie, et l’envoya de même dans les montagnes ; et elle revint saine.] Et tout le peuple admira qu’il ne se fût point manifesté en eux de péché. Et le prêtre dit : Dieu n’a point manifesté votre péché, et moi, je ne vous juge pas ; et il les renvoya absous. Joseph ayant donc reçu Marie, s’en alla dans sa maison tout joyeux, et glorifiant le Dieu d’Israël.

XVII. — Or, on publia un décret d’Auguste César pour faire inscrire tous ceux qui étaient à Bethléem[2]. Et Joseph dit : J’aurai soin de faire inscrire mes enfants ; mais que ferai-je de cette petite fille ? [Comment l’inscrirai-je ?] L’inscrirai-je comme ma femme ? [Elle n’est point ma femme, car je l’ai reçue du temple du Seigneur pour la conserver.] Comme ma fille ? mais [tous] les enfants d’Israël savent qu’elle n’est pas ma fille. Qu’en ferai-je ? assurément au jour du Seigneur je ferai comme le Seigneur voudra. Et Joseph sella une ânesse, et la fit monter sur l’ânesse. Or, Joseph[3] et Simon suivaient à trois milles. Et Joseph, se retournant, la vit triste, et il dit en soi-même : Peut-être que ce qui est en elle l’attriste. Et, s’étant retourné une seconde fois, Joseph la vit riante, et il lui dit : Ô Marie, qu’est-ce qui est cause que je vois votre face tantôt joyeuse, et tantôt triste ? et Marie dit à Joseph : C’est que je vois devant mes yeux deux peuples[4], un qui pleure et qui gémit, mais l’autre qui tressaille de joie et qui rit. Et il vint à mi-chemin ; et Marie lui dit : Descendez-moi de l’ânesse, parce que ce qui est en moi me presse pour sortir. Et il la descendit de l’ânesse et lui dit : Où vous conduirai-je, parce que le lieu est désert ? Or, Marie dit encore une fois à Joseph : Emmenez-moi, car ce qui est en moi me presse extrêmement ; et aussitôt il l’emmena.

XVIII. — Et trouvant là une caverne, il l’y fit entrer, et la laissa en garde à son fils ; et il sortit pour chercher une sage-femme juive dans la région de Bethléem. Or, comme Joseph était en

  1. Num., v, v. 18. (Note de Voltaire.)
  2. Luc., ii, v. 1. (Id.)
  3. Marc., vi, v. 3. Ce Joseph est aussi nommé Joses, et les quatre frères de Jésus sont Jacques, Joseph, Judas, et Simon. (Id.)
  4. Genes., xxv, v. 23. (Id.)