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fallait des degrés pour aller à l’autel de l’holocauste qui était par dehors. Les parents placèrent donc la petite bienheureuse vierge Marie sur le premier. Et comme ils quittaient les habits qu’ils avaient eus en chemin, et qu’ils en mettaient de plus beaux et de plus propres, selon l’usage, la vierge du Seigneur monta tous[1] les degrés un à un sans qu’on lui donnât la main pour la conduire ou la soutenir, de manière qu’en cela seul on eût pensé qu’elle était déjà d’un âge parfait. Car le Seigneur, dès l’enfance de sa vierge, opérait déjà quelque chose de grand, et faisait voir d’avance, par ce miracle, combien grands seraient les suivants. Ayant donc célébré le sacrifice selon la coutume de la loi[2], et accompli leur vœu, ils l’envoyèrent dans l’enclos du temple pour y être élevée avec les autres vierges ; et eux retournèrent à la maison.

VII. — Or la vierge du Seigneur, en avançant en âge, profitait en vertus, et suivant le Psalmiste[3], « son père et sa mère l’avaient délaissée ; mais le Seigneur prit soin d’elle ». Car tous les jours elle était fréquentée par les anges, tous les jours elle jouissait de la vision divine, qui la préservait de tous les maux et la comblait de tous les biens. C’est pourquoi elle vint à l’âge de quatorze ans sans que non-seulement les méchants pussent rien inventer de répréhensible en elle, mais tous les bons qui la connaissaient trouvaient sa vie et sa conversation dignes d’admiration. Alors le pontife[4] annonçait publiquement que les vierges que l’on élevait publiquement dans le temple, et qui avaient cet âge accompli, s’en retournassent à la maison pour se marier selon la coutume de la nation et la maturité de l’âge. Les autres ayant obéi à cet ordre avec empressement, la vierge du Seigneur, Marie, fut la seule qui s’excusa de le faire, disant que non-seulement ses parents l’avaient engagée au service du Seigneur, mais encore qu’elle avait voué au Seigneur sa virginité, qu’elle ne voulait jamais violer en habitant avec un homme. Le pontife, fort embarrassé, ne pensant pas qu’il fallût enfreindre son vœu, ce qui serait contre l’Écriture, qui dit : Vouez et rendez[5], ni s’ingérer d’introduire une coutume inusitée chez la nation, ordonna que tous les principaux de Jérusalem et des lieux voisins se trou-

  1. La chose est rapportée un peu différemment, art. iv du Protévangile de Jacques. (Note de Voltaire.)
  2. I. Sam., ch. i, v. 25. (Id.)
  3. Ps. xxvi, v. 10. (Id.)
  4. Il est nommé Zacharie dans le Protévangile de Jacques. (Id.) — Voyez p.474.
  5. Ps. lxxv, v. 11. (Note de Voltaire.)