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CHAPITRE II.


faits principaux peuvent être vrais, et les détails très-faux. Il peut y avoir eu un prince égyptien nommé Sésostris par les Grecs, qui ont changé tous les noms d’Égypte et de l’Asie, comme les Italiens donnent le nom de Londra à London, que nous appelons Londres, et celui de Luigi aux rois de France nommés Louis. Mais, s’il y eut un Sésostris, il n’est pas absolument sûr que son père destina tous les enfants égyptiens qui naquirent le même mois que son fils à être un jour avec lui les conquérants du monde. On pourrait même douter qu’il ait fait courir chaque matin cinq ou six lieues à ces enfants avant de leur donner à déjeuner.

L’enfance de Cyrus exposée, les oracles rendus à Crésus, l’aventure des oreilles du mage Smerdis, le cheval de Darius, qui créa son maître roi, et tous ces embellissements de l’histoire, pourraient être contestés par des gens qui en croiraient plus leur raison que leurs livres.

Il a osé dire, et même prouver, que les monuments les plus célèbres, les fêtes, les commémorations les plus solennelles, ne constatent point du tout la vérité des prétendus événements transmis de siècle en siècle à la crédulité humaine par ces solennités.

Il a fait voir que si des statues, des temples, des cérémonies annuelles, des jeux, des mystères institués, étaient une preuve, il s’ensuivrait que Castor et Pollux combattirent en effet pour les Romains ; que Jupiter les arrêta dans leur fuite ; il s’ensuivrait que les Fastes d’Ovide sont des témoignages irréfragables de tous les miracles de l’ancienne Rome, et que tous les temples de la Grèce étaient des archives de la vérité.

Voyez dans le résumé de son Essai sur les Mœurs et l’Esprit des nations[1].


CHAPITRE II.
de bossuet.

Nous sommes dans le siècle où l’on a détruit presque toutes les erreurs de physique. Il n’est plus permis de parler de l’empyrée, ni des cieux cristallins, ni de la sphère de feu dans le cercle de la lune. Pourquoi sera-t-il permis à Rollin, d’ailleurs si estimable, de nous bercer de tous les contes d’Hérodote, et de nous donner pour une histoire véridique un conte donné par Xénophon pour

  1. Pages 173 et suivantes du tome XIII de la présente édition.