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17i CHAPITRE XXXI.

��CHAPITRE XXXI.

DE l"a1R.

1 Quelques philosophes ont nié qu'il y eût de l'air. Ils disent qu'il est inutile d'admettre un être qu'on ne voit jamais, et dont tous les efTets s'expliquent si aisément par les Tapeurs qui sortent du sein de la terre. Newton a démontré que le corps le plus dur a moins de matière que de pores. Des exhalaisons continuelles s'échappent en foule de toutes les parties de notre globe. Un cheval jeune et vigoureux, ramené tout en sueur dans son écurie en temps d'hiver, est entouré d'une atmosphère mille fois moins considérable que notre globe ne l'est de la matière de sa propre transpiration.

Cette transpiration, ces exhalaisons, ces vapeurs innombrables, s'échappent sans cesse par des pores innombrables, et ont elles- mêmes des pores. C'est ce mouvement continu en tout sens qui forme et qui détruit sans cesse végétaux, minéraux, métaux, ani- maux. C'est ce qui a fait penser à plusieurs que le mouvement est essentiel à la matière, puisqu'il n'y a pas une particule dans laquelle il n'y ait un mouvement continu. Et si la puissance for- matrice éternelle qui préside à tous les globes est l'auteur de tout mouvement, elle a voulu du moins que ce mouvement ne périt jamais. Or ce qui est toujours indestructible a pu paraître es- sentiel, comme l'étendue et la solidité ont paru essentielles. Si cette idée est une erreur, elle est pardonnable : car il n'y a que l'erreur malicieuse et de mauvaise foi qui ne mérite pas d'indul- gence.

Mais qu'on regarde le mouvement comme essentiel ou non, il est indubitable que les exhalaisons de notre globe s'élèvent et retombent, sans aucun relâche, à un mille, à deux milles, à trois milles au-dessus de nos têtes. Au mont Atlas, à l'extrémité du ïaurus, tout homme peut voir tous les jours les nuages se former sous ses pieds. Il est arrivé mille fois à des voyageurs d'être au- dessus de l'arc-en-ciel, des éclairs, et du tonnerre.

travaux de Layoi>ier. Il est certain que l'ignorance de ces temps encore si rap- proches de nous était profonde, relativement à la nature et à la constitution des corps. On ne peut que s"étonner de voir Voltaire forcé, faute de preuves, d'admettre les éléments, et cependant les repousser instinctivement dans certains cas. (D.)

l.Le commencement de ce chapitre a été reproduit par Voltaire, en 1770, dans ses Questions sur l'Encyclopédie, au mot Air; voj-ez tome XVII, page 89.

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