Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome27.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée

UO CHAPITRE XI.

fertilisé les campagnes; des milliers de fontaines qui partent de la même source, et qui abreuvent le genre animal et le végétal : tout cela ne parait pas plus l'effet d'un cas fortuit et d'une décli- naison d'atomes que la rétine qui reçoit les rayons de la lumière, le cristallin qui les réfracte; l'enclume, le marteau, l'étrier, le tambour de l'oreille, qui reçoit les sons, les routes du sang dans nos veines, la systole et la diastole du cœur, ce balancier de la machine qui fait la vie.

��CHAPITRE XI.

DE LA FORMATION DES MONTAGNES.

On ne s'est pas contenté do dire que notre terre avait été originairement de verre * ; Maillet a imaginé que nos mon- tagnes avaient été faites par le flux, le reflux, et les courants de la mer.

Cette étrange imagination a été fortifiée dans VHistoire natu- relle imprimée au Louvre, comme un enfant inconnu et exposé est quelquefois recueilli par un grand seigneur ; mais le public philosophe n'a pas adopté cet enfant, et il est diflicile à élever. Il est trop visible que la mer ne fait point une chaîne de roches sur la terre. Le flux peut amonceler un peu de sable, mais le reflux l'emporte. Des courants d'eau ne peuvent produire lentement, dans des siècles innombrables, une suite immense de rochers nécessaires dans tous les temps. L'Océan ne peut avoir quitté son lit, creusé par la nature, pour aller élever au-dessus des nues les rochers de rimmaûs et du Caucase, L'Océan, une fois formé, une fois placé, ne peut pas plus quitter la moitié du globe pour se jeter sur l'autre qu'une pierre ne peut quitter la terre pour aller dans la lune.

Sur quelles raisons apparentes appuie-t-on ce paradoxe? Sur ce qu'on prétend que, dans les vallées des Alpes, les angles sail- lants d'une montagne à l'occident répondent aux angles rentrants d'une montagne à l'orient. II faut bien, dit-on, que les courants de la mer aient produit ces angles. La conclusion est hasardée. Le fait peut être vrai dans quelques vallons étroits ; il ne l'est pas dans le grand bassin de la Savoie et du lac de Genève; il ne l'est pas dans la grande vallée de l'Arno, autour de Florence ; mais à

t. Buffon; voyez la note des éditeurs de Kelil, tome XXI, page 332.

�� �