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L’ÉPÎTRE

« À Dieu le seul sage honneur et gloire par Jésus-Christ[1]. »

« Jésus nous a été donné de Dieu[2]. »

« Que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le père de gloire, vous donne l’esprit de sagesse[3]. »

C’est ainsi que le Juif chrétien saint Paul s’explique toujours ; c’est ainsi qu’on fait parler Jésus lui-même dans les Évangiles[4]. « Mon père est plus grand que moi ; » c’est-à-dire, Dieu fait ce que les hommes ne peuvent faire, car tous les Juifs, en parlant de Dieu, disaient mon père.

La patenôtre commence par ces mots : « Notre père. » Jésus dit : « Nul ne le sait que le père. Nul autre que mon père ne sait ce jour, pas même les anges[5]. Cela ne dépend pas de moi, mais seulement de mon père[6]. » Il est encore très-remarquable que Jésus, craignant d’être appréhendé au corps, et suant de peur sang et eau, s’écria : « Mon père, que ce calice s’éloigne de moi[7] ! » C’est ce qu’un polisson[8] de nos jours appelle mourir en Dieu. Enfin aucun Évangile ne lui a mis dans la bouche ce blasphème, qu’il était Dieu, consubstantiel à Dieu.

Romains, vous m’allez demander pourquoi, comment on en fit un Dieu dans la suite des temps ? Et moi, je vous demande pourquoi et comment on fit des dieux de Bacchus, de Persée, d’Hercule, de Romulus : encore ne poussa-t-on pas le sacrilége jusqu’à leur donner le titre de Dieu suprême, de Dieu créateur ; ce blasphème était réservé pour la secte échappée de la secte juive.

SIXIÈME IMPOSTURE PRINCIPALE.

Je passe sous silence les innombrables impostures des voyages de Simon Barjone, de l’Évangile de Simon Barjone, de son Apocalypse, de l’Apocalypse de Cérinthe, ridiculement attribuée à Jean, des Épîtres de Barnabé, de l’Évangile des douze apôtres, de leurs Liturgies, des Canons du concile des apôtres, de la Confection du Credo par les apôtres, les voyages de Matthieu, les voyages de Thomas, et de tant de rêveries reconnues enfin pour être de

  1. Épître aux Romains, xvi, 27. (Note de Voltaire.)
  2. Épître aux Galates, ch. i. (Id.)
  3. Épître aux Éphésiens, i, 17. (Id.)
  4. Jean, xiv, 28. (Id.)
  5. Matthieu, xxiv, 36. (Id.)
  6. Ibid., xx, 23. (Id.)
  7. Luc, xxii, 44, 42. (Id.)
  8. J.-J. Rousseau, dans la Profession du vicaire savoyard (au quatrième livre d’Émile).