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EPITRE

ÉCRITE DE CONSTANTINOPLE AUX FRÈRES^

��Nos frères, qui êtes répandus sur la terre, et non dispersés, qui habitez les îles de Niplion et celles des Cassitérides-, quiètes unis dans les mêmes sentiments sans vous les être communiqués, adorateurs d'un seul Dieu, pieux sans superstition, religieux sans cérémonies, zélés sans enthousiasme, recevez ce témoignage de notre union et de notre amitié; nous aimons tous les hommes; mais nous vous chérissons par-dessus les autres, et nous ofïrons avec vous nos purs hommages au Dieu de tous les globes, de tous les temps et de tous les êtres.

Nos cruels ennemis, les brames, les fakirs, les bonzes, les tala- poins, les derviches, les marabous, ne cessent d'élever contre nous leurs voix discordantes ; divisés entre eux dans leurs fables, ils semblent réunis contre notre vérité simple et auguste. Ces aveu- gles, qui se battent à tâtons, sont tous armés contre nous, qui marchons paisiblement à la lumière.

Ils ne savent pas quelles sont nos forces. Nous remplissons toute la terre ; les temples ne pourraient nous contenir, et notre temple est l'univers. Nous étions avant qu'aucune de ces sectes eût pris naissance. Nous sommes encore tels que furent nos pre- miers pères sortis des mains de l'Éternel ; nous lui offrons comme eux des vœux simples dans l'innocence et dans la paix. Notre religion réelle a vu naître et mourir mille cultes fantastiques, ceux de Zoroastre, d'Osiris, de Zamolxis, d'Orphée, de Numa, d'Odin, et de tant d'autres. Nous subsistons toujours les mêmes au milieu

1. Cet opuscule, sans date dans l'édition de Kehl comme dans les douze édi- tions que l'on publie depuis dix ans, doit être postérieur, mais de très-peu de temps, à l'époque où la fureur théologique se déchaîna contre la tolérance du vieux Bélisaire. C'est vers 1768 que Grimm qualifiait Voltaire du titre de Patriarche in petto de Constantinople. (Cl.)

'2. Le Japon et l'Angleterre. (K.)

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