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DES ÉGLISES DE POLOGNE. 463

préside, jugea cette cause. Un jésuite y plaida contre la ville de Thorn; l'arrêt fut porté toi que les jésuites le désiraient. Le pré- sident Rosner, accusé de ne s'être pas assez opposé au tumulte, fut décapité malgré les privilèges de sa charge. Quelques assesseurs, et d'autres principaux bourgeois, périrent par le même supplice. Deux artisans furent brûlés, d'autres furent pendus. On n'aurait pas traité autrement des assassins. Les hommes n'ont pas encore appris à proportionner les peines aux fautes. Cette science cependant n'est pas moins nécessaire que celle de Copernic, qui découvrit dans Thorn le vrai système de l'univers, et qui prouva que notre terre, souvent si mal gouvernée et assiégée de tant de malheurs, roule autour du soleil dans son orbite immense.

La Pologne semblait donc destinée à subir le sort de tant d'autres États que les querelles de religion ont dévastés.

Un ministre évangélique, nommé Mokzulki, fut tué impuné- ment en 1753, dans un grand chemin, par le curé de Birze : voilà déjà une hostilité de l'Église militante. Un dominicain de Popiel, en 1762, assomma à coups de bâton le prédicant Jaugel, à la porte d'un malade qu'il allait consoler.

Le curé de la paroisse de Cône, rencontrant un mort luthé- rien qu'on portait au cimetière; battit le ministre, renversa le cercueil, et fit jeter le corps à la voirie.

En 1765, plusieurs jésuites, avec d'autres moines, voulurent changer les grecs en romains à Msczislau en Lithuanie. Ils for- çaient à coups de bâton les pères et les mères de mener les en- fants dans les églises. Soixante et dix gentilshommes s'y opposè- rent ; les missionnaires se battirent contre eux. Les gentilshommes furent traités comme des sacrilèges : ils furent condamnés à la mort, et ne sauvèrent leur vie qu'en allant à l'église des jésuites.

On priva alors en Lithuanie du droit de bourgeoisie, on raya du corps des métiers les bourgeois et les artisans qui n'allaient pas à la messe latine. Enfin on a exclu des diétines tous les gen- tilshommes dissidents, que les droits de la naissance et les lois du royaume y appellent.

Tant de rigueur, tant de persécutions, tant d'infractions des lois, ont enfin réveillé des gentilshommes que leurs ennemis croyaient avoir abattus. Ils s'assemblèrent, ils invoquèrent les lois de leur patrie, et les puissances garantes de ces lois.

Il faut savoir que leurs droits avaient été solennellement con- firmés par la Suède, l'empire d'Allemagne, la Pologne entière, et particulièrement par l'électeur de Brandebourg dans le traité

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