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322 ARBITRAGE ENTRE M. DE VOLTAIRE

quelques lignes corrigées de la propre main du cardinal, comme je n'en doute pas. Les mots écrits de sa main sont une démons- tration qu'il avait vu l'ouvrage, et laissent penser en même temps que l'ouvrage n'était point de lui, mais qu'il l'approuvait.

Il semble surtout par ces mots : a Monaco, si vous reperdez Aire, galères d'Espagne perdues par la tempête, etc., » que ce sont des avis qu'il donne à l'écrivain qu'il fait travailler.

M. de Voltaire nous a donné la véritable époque du temps auquel ce discours fut écrit : « Ce ne peut être S dit-il, que sur la fm de juillet ou au mois d'auguste 1641 », puisque la ville d'Aire fut prise le 27 juillet 16/|1, et reprise un mois après par les Espagnols.

Le cardinal avertit donc l'écrivain par cette note de ne pas parler de la conquête d'Aire, que l'on est prêt de perdre ; et il l'avertit qu'il pourra parler de- Monaco, dont en effet on s'em- para le 18 novembre de cette même année : il devient donc res- ponsable de cette pièce, quoiqu'il n'en soit point l'auteur. Ainsi les princes, dans leurs manifestes et dans leurs traités, sont censés parler eux-mêmes. Le discours dont il s'agit est visiblement un manifeste écrit par l'ordre du cardinal de Ricbolieu, pour justifier toute sa conduite depuis qu'il était entré dans le ministère.

M. de Voltaire demande pourquoi ce manifeste n'est point signé par le cardinal? En voici, je crois, la raison :

Le cardinal voulait et devait examiner bien soigneusement ce mémoire avant de le présenter au roi. L'auteur, dans le dessein de relever toutes les actions du premier ministre, le faisait parler en plusieurs endroits d'une manière un peu contraire à la vérité et à la modestie. Il lui faisait dire des choses dont Louis XIII n'aurait que trop connu la fausseté. Il était impossible que le cardinal de Richelieu, en entrant dans le conseil, eût promis au roi la ruine des protestants et l'abaissement des grands. C'était le marquis duc de La Vieuville qui était alors premier ministre. C'est le titre que le comte de Brienne, secrétaire d'État, lui donne. Le comte de Brienne nous apprend dans ses mémoires que ce fut le duc de La Vieuville qui fit entrer le cardinal au conseil, pour y assister seulement, ainsi que le cardinal de La Rochefoucauld ^ Le roi ne lui donna point alors le secret des affaires.

��1. Voyez page 288.

2. N. B. Il pai-aît pourtant bien difficile à croire que le cardinal de Richelieu ait fait en juillet une note de Monaco, qui ne fut au pouvoir du roi qu'au mois de novembre. {Note de Voltaire.)

3. Mémoires de Brienne, tome P"", page IGO. {Id.)

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