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NOUVEAUX DOUTES 283

Ne lui aurait-elle pas fait voir ce fameux testament? Ne lui au- rait-elle pas dit : Comment oubliez-vous un ouvrage si intéres- sant, si public, et qu'on croit si glorieux pour mon oncle? M. de Foncemagne sait assez du moins que c'est ainsi qu'en aurait usé une troisième duchesse d'Aiguillon S non moins célèbre que les deux autres, partout ce qui peut mériter l'estime et les hom- mages du public.

Non-seulement Aubery ne parle point de ce testament dans cette histoire, mais voici comme il s'exprime dans celle du car- dinal Mazarin^ :

« On a imprimé ces derniers jours (c'est-à-dire en 1688) un Testament politique du cardinal de Richelieu, contre lequel il n'y a point de lecteurs, pour peu de lumière ou de connaissance qu'ils aient de l'histoire du temps, qui ne réclament et ne se récrient. Il ne faut, pour le détruire, que les mômes raisons dont rimprimeur se sert pour essayer de rétablir.

(c Ce n'est en effet qu'un ouvrage de doctrine, qui traite par- ticulièrement des appels comme d'abus, des cas privilégiés, de la régale prétendue par la Sainte-Chapelle sur tous les évéchés de France, des exemptions du patronage ecclésiastique et laïque, du droit d'induit et d'autres matières semblables ; de sorte que c'est tacitement reprocher à un si fameux ministre l'ambition et la honte d'avoir voulu s'ériger en auteur, et faire à peu près des recherches comme celles de Pasquier.

« D'ailleurs, étant un ouvrage assez gros, et rempli d'obser- vations fort communes, on ne saurait s'imaginer auquel de ses secrétaires il l'aurait dicté, et encore moins comme il l'aurait écrit lui-même. Il est constant que le cardinal de Richelieu a toujours dicté, et n'a jamais guère écrit,

(c Mais il y a plus : on y remarque force impertinences, bé- vues et suppositions. Ce prétendu testament commence par une lettre du testateur au feu roi, avec la souscription Armand Du- plessis : cependant il n'a jamais souscrit ses lettres à Louis XIII que de deux manières, ou comme évêque, ou comme cardinal. La première des deux était l'évêque de Luçon, et l'autre le car- dinal de Richelieu. Il n'y en doit point avoir de troisième ; et, s'il s'en trouve, ce ne peut être qu'une pièce supposée.

« On opine à peu près de même du reproche qu'on lui fait

1. Voltaire correspondait avec elle. On l'avait surnommée la sœur de i)ot des philosophes. (G. A.)

2. Aubery, Histoire du cardinal Mazarin, tome IV, pages 337 et 338, édition de '17J8, à Amsterdam, chez Le Cène. {Note de Voltaire.)

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