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DU CARDINAL DE RICHELIEU. 279

croire encore qu'il n'en est point Fauteur. Je vous dirais qu'il n'est pas dans la yraisemblance qu'Agrippa fasse un tel testament politique pour Auguste, ni Séjan pour Tibère, ni La Trimouille pour Charles YII, ni George d'Amboise pour Louis XII, ni Wolsey pour Henri VIII, ni Buckingliam pour Jacques I", ni Olivarès pour Philippe IV, ni enfin Richelieu pour Louis XIII. Un ministre dit à son maître de vive voix tout ce qu'il croit important, et sur- tout il ne fait point de testament pour lui dire des choses vagues, inutiles et fausses.

Scilicet in magnis labor est, ea cura potenles Sollicitât...

(ViRG., .En., IV, 379.)

« Ces sortes de livres sont d'ordinaire le partage des politiques oisifs. Quand le duc de Sully, dans sa retraite, fit composer ses Mémoires par ses secrétaires, il ne donna point de leçons d'enfant à Louis XIII.

« Vous avez beau employer toutes les ressources de votre esprit, vous avez beau recueillir quelques maximes éparses dans le Testament jwlitique pour tacher de les faire regarder comme des émanations de l'âme du cardinal de Richelieu.

« Eh, monsieur, vous savez mieux que moi que Ralzac, Sir- mond. Chapelain, Sillion, Sérisy, en ont débité dix fois davan- tage. Depuis quand les lieux communs sont-ils un si grand mérite? Ne trouve-t-on pas des maximes partout? J'ouvre le prétendu Testament de Louvois S dont Courtilz est l'auteur ; j'y vois : « L'exemple tient très-souvent lieu de raison. Il est de la prudence (( de faire place au torrent, il perd sa rapidité dans sa course. « Qui veut s'élever trop haut attire l'envie de ses égaux et la « haine de ses supérieurs.» Il y en a cent de cette espèce. On en trouve dans le Testament ridicule clu cardinal Albèroni-, et dans celui du maréchal de Belle-Isle^ Je suppose que quelques-unes des maximes et des anecdotes qui sont dans le livre attribué au cardinal aient été en effet recueillies dans sa bouche, s'ensuivra- t-il qu'on doive lui attribuer l'ouvrage? Faut-il d'ailleurs de si

��1. Voyez, tome XXIII, la note 2 de la page 429.

2. Voyez, tome XXIV, page 11, VExamen du Testament politique clu cardinal Albèroni.

— Cette citation du Testament du cardinal Albèroni, qui fut publié en 1753. démentait la date de 1750 que Voltaire assignait à sa lettre. C'est ce que lui fit observer son ami d'Argental. (G. A.)

3. Voyez la note 2, tome XXI, page 329.

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