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Ui DISCOURS AUX WELCHES,

Et, du nom des Troyens ennemis implacables. Attaquer en tous lieux ces rivaux redoutables! Que l'univers en proie à ces deux nations Soit le théâtre affreux de leurs dissensions; Que tout serve à nourrir cette haine invincible; Qu'elle croisse toujours jusqu'au moment terrible Que l'un ou l'autre cède au armes du vainqueur; Que ses derniers efforts signalent sa fureur !

Voyez, je vous prie, combien cette copie prétendue est faible, vicieuse, forcée, languissante.

Puisse après mon trépas s'élever de ma cendre Un feu qui sur la tcri-e aille au loin se répandre !

Que veut dire ce feu qui ira se répandre au loin sur la terre? Retrouve-t-on dans ces vers hérissés de chevilles le moindre mot qui rappelle les idées de douleur, de terreur, de vengeance, qui respirent dans ce vers frappant :

Exoriare aliquis nostiis ex ossibus ultor?

Il s'agit d'un vengeur; et le plat imitateur nous parle d'un feu qui ira au loin se répandre. Que ces rimes en épithètes, implacables, redoutables, invincibles, terribles, énervent la peinture de Virgile! Que toute épithète qui n'ajoute rien au sens est puérile!

Je ne sais pas de qui sont ces vers^; mais je sais que quand on oppose ainsi les rimailleries d'un poëte welche aux plus beaux morceaux de l'antiquité, on ne lui rend pas un bon office.

Français! je me fais un plaisir d'admirer avec vous vos grands poètes : ce sont eux principalement qui ont porté votre langue jusque sous le cercle polaire, et qui ont forcé des Italiens et des Espagnols même à l'apprendre. Je commence par votre naïf et aimable La Fontaine : la plupart de ses fables sont prises chez Ésope le Phrygien, et chez Phèdre le .Romain. Il y en a en- viron cinquante qui sont des chefs-d'œuvre pour le naturel, pour les grûces, et pour la diction. Ce genre même est inconnu aux autres nations modernes. J'aurais souhaité, je l'avoue, que, dans

��1. Voltaire savait bien que ces vers sont de J.-J. Lefranc de Pompignan, et se trouvent à la scène iv de lacté V de sa Didon, tragédie dont il avait cité des passages dans le Fragment d'une lettre (voyez tome XXH, page 231), qu'il rappelle dans un vers du Pauvre Diable (voyez tome X), et dont il cita aussi, depuis, des vers (voyez tome XX, page 503).

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