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162 ARTICLES EXTRAITS

liumaiii s'étend tous les jours, et nous ne devons pas désespérer de recevoir bientôt des poétiques et des rhétoriques des îles Orcades. Il est vrai qu'on aimerait mieux encore voir de grands artistes dans ces pays-là que de grands raisonneurs sur les arts : on trouvera toujours plus d'écrivains en état de faire des éléments de critique, comme milord Kaims, qu'une bonne histoire, comme ses compatriotes, M. Hume et M. Rohertson.

Il est aisé de dire son avis sur le Tasse et l'Arioste, sur Michel-Ange et Raphaël; il n'est pas si aisé de les imiter, et il faut avouer qu'aujourd'hui nous avons plus besoin d'exemples que de préceptes, aussi bien en France qu'en Ecosse.

Au reste, si M. Home est si sévère envers tous nos meilleurs auteurs, et si indulgent envers Shakespeare, il faut avouer qu'il ne traite pas mieux Virgile et Horace,

S'il veut donner l'exemple de quelque balourdise, c'est dans Virgile qu'il va la chercher. Il se moque de la contradiction ma- nifeste qu'il suppose dans ces vers du premier livre de FÉnèide ^ :

Graviter commotus, et alto Prospiciens summa placidum caput extulit unda.

Il croit que le placidum contredit le commotus; il ne voit pas que placidum caput veut dire ce front qui apaise les tempêtes; il ne voit pas qu'un maître irrité peut, en montrant un front serein, apaiser les querelles de ses esclaves.

Il trouve indécent qu'Horace, dans une épître familière à Mécène, dise^ :

Quid causae est, merito quin illis Jupiter ambas Iratus buccas inflet?

Il oublie que cette expression inflare buccas, ^iour Aire menacer , était tirée du grec, familière aux Romains, et du ton le plus conve- nable à la satire.

M. Home donne toujours son opinion pour une loi, et il étend son despotisme sur tous les objets. C'est un juge à qui toutes les causes ressortissent.

Ses arrêts sur l'architecture et sur les jardins ne nous per- mettent pas de douter qu'il ne soit de tous les magistrats d'Ecosse le mieux logé, et qu'il n'ait le plus beau parc. Il trouve les bos-

��1. Vers 130.

2. Livre I, satire i. 20-21,

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