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SUR LES MŒURS. o83

11 en est à peu près de même en Allemagne, en Angleterre, et en Italie.

On se perd dans cette immensité ; heureusement la plupart de ces livres ne méritent pas d'être lus, de même que les petites choses qu'ils contiennent n'ont pas mérité d'être écrites. Dans cette foule d'histoires, on ne trouve que trop de romans tels que ceux de Gatien de Courtilz. Les histoires secrètes composées par ceux qui n'ont été dans aucun secret sont assez nombreuses ; mais les auteurs qui ont gouverné l'État du fond de leur cabinet le sont encore davantage : on peut compter parmi ces derniers ceux qui ont pris la peine de faire les testaments des princes et ceux des hommes d'État ; c'est ainsi que nous avons eu les tes- taments du maréchal de Belle-Isle, du cardinal Albéroni, du duc de Lorraine, des ministres Colbert et Louvois, du maréchal Vauban^ des cardinaux de Mazarin- et de Richelieu.

Le public fut trompé longtemps sur le Testament du cardinal de Richelieu^; on crut le livre excellent, parce qu'on le crut d'un grand ministre. Très-peu d'hommes ont le temps de lire avec attention. Presque personne n'examina ni les méprises, ni les erreurs, ni les anachronismes, ni les indécences, ni les contra- dictions, ni les incompatibilités, dont le livre est rempli. On ne fit pas réflexion que ce livre n'avait été imprimé que plus de qua- rante ans après la mort du cardinal, qu'il est signé d'une ma- nière dont le cardinal ne signait jamais. On oubliait qu"Aubéry\ qui écrivait la vie du cardinal de PJchelieu par ordre de sa nièce, traita le Testament de livre apocryphe et supposé, de livre indigne de son héros, indigne de toute croyance. Aubéry était à la source, il avait en main tous les papiers : il n'y a pas, assu- rément, de témoignage plus fort que le sien.

Le savant abbé Richard, l'auteur des Mélanges de Vigneul- Marville, Charles Ancillon, La Monnoye, pensèrent de même.

On trouve, dans le chapitre intitulé les Mensonges imprimés^, toutes les raisons qui doivent faire penser que ce Testament poU-

��1. Voyez la note, tome XXI, page 3-28 .

2. Le Testament politique du cardinal Mazarin, 1(385, in-12, est d'un inconnu. L'ouvrage publié en 1707 sous le même titre est un libelle traduit de l'italien. Pour les autres pièces dont parle ici Voltaire, voyez les notes, t. XIX. p. 31.

3. Voyez tome XVII, page 211; XIX. 31; XX, 430; XXII, 258; XXIII, 427; et, plus loin, les Doutes nouveaux et l'Arbitrage.

4. Voyez les Doutes nouveaux.

5. L'opuscule Des Mensonges imprimés (voyez tome XXIII, page 427) forme, dans beaucoup d'éditions de Voltaire, un chapitre des volumes de Mélanges.

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