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510 ÉCLxVlRCÎSSE.MENTS HISTORIQUES.

écrit à Gorisande d'Andouin, « Et vous êtes de cette religion ! j'aimerais mieux me faire turc * » ; le monarque à qui Rosny con- seilla de changer, et auquel il dit : » Il faut que vous deveniez catlioli(jue, et que je reste huguenot »; ce même homme, dis-je, aurait-il cru sincèrement que la religion romaine, dont il était opprimé, était la seule bonne religion ? Elle l'est sans doute; mais était-ce à lui de le croire, tandis qu'alors même on prêchait contre lui avec fureur, tandis qu'on avait établi contre lui cette prière publique : a Délivrez-nous du Béarnais et du diable » , tandis qu'on le peignait lui-même en diable, avec une queue et des cornes ?

Ce grand homme, si lâchement persécuté, obligé de plier sou courage sous les lois de ses ennemis, ne daigna pas seulement signer la confession de foi rédigée, après bien des contestations, par David Duperron, telle qu'on la trouve dans les Mémoires du duc de Sully, qui en fit supprimer bien des minuties. Henri IV la fit seulement signer par Loménie.

On peut, dans un vain panégyrique, représenter ce héros comme un converti ; mais l'histoire doit dire la vérité. Daniel ne l'a point dite: cet historien parle plus avantageusement du frère Coton- que du plus grand roi de la France.

On passe à Daniel d'avoir été assez ignorant pour appeler Lo- gnac, ce chef des Quarante-cinq, ce Gascon assassin du duc de Guise, « premier gentilhomme de la chambre ». On lui passe de n'avoir jamais rien su des fameux états de 1355. On lève les épaules quand il dit que les médecins ordonnèrent à Louis VIII de prendre une fille pour guérir de sa dernière maladie, et qu'il aima mieux mourir que de guérir par ce remède, lui qui d'ail- leurs en avait un tout prêt dans son épouse, la plus belle prin- cesse de l'Europe. On est révolté de son peu de connaissance des lois, et ennuyé de ses récits confus de batailles. Mais quand il peint Henri IV dévot, et faisant le métier de délateur contre les protestants auprès de la république de Venise, on joint à bien peu d'estime beaucoup d'indignation.

' Remar(iuons ([ue l'auteur tle (a Ilenriadc et de l'Essai sur les Mœurs et l'Esprit des nations, ayant lu autrefois dans Daniel l'iiis-

��1. Celte plirasc n'usl pas U;\Uiellciiiciil dans les lottros do Henri 1\ ; iiuiis les deux membres sont dans les 4 c(. 5" des lettres rapportées dans le ehap. clxxiv de V Essai sur les Mœurs; voyez tome XII, pages 51)0, àlu.

2. C'était le confesseur de Henri IV. Voltaire en paile quelquefois ; voyez tome XVI, patîc 2i ; XVIII, '22t) ; XIX, 501.

A. Ce dernier alinéa est de 1777.

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