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ÉCLAIRCISSKMENTS HISTORIQUES. 507

saire : on met les lettres à la poste, et le duc de Guise vient à Paris, ayant pour excuse apparente qu'il n'a point reçu l'ordre. »

Voulez-vous savoir maintenant d'où est tirée cette anecdocte? Des Mémoires de Xevers, et d'un journal de L'Estoile. Vous traitez cet auteur de petit bourgeois ; L'Estoile était d'une ancienne no- blesse; mais, qu'il ait été bourgeois ou fils d'un crochcteur de Besançon, voici ses paroles, page 95, tome II :

a II y avait cependant une négociation entamée à Soissons entre le duc de Guise et Bellièvre, qui devait dans trois jours lui apporter des sûretés de la part du roi. Des affaires plus pressées empêchèrent Bellièvre d'aller finir la commission : il écrivit néan- moins au duc de Guise pour l'avertir de son retard ; mais le commis de l'épargne, c'est-à-dire du trésor royal, refusa de donner vingt-cinq écus pour faire partirlesdeux courriers qu'on envoyait à Soissons : Ton mit les deux paquets à la poste, et ils arrivèrent trop tard, parce que le duc de Guise, pressé par les ligueurs de se rendre à Paris, partit de Soissons au bout de trois jours. »

XXXÏl<= SOTTISE DE NONOTTE.

SUR LE PnÉTENDL SLPPLICR DE MaP.IE d'aHAGON.

Il est utile de détruire tous les contes ridicules dont les roman- ciers, soit moines, soit séculiers, ont inondé le moyen âge. Un Geoffroi de Viterbe s'avisa d'écrire, à la fin du xii^ siècle, une chronique telle qu'on les faisait alors : il conte que, deux cents ans auparavant, Othon III, ayant épousé Marie d'Aragon, cette impératrice devint amoureuse d'un comte du pays de Modène ; que ce jeune homme ne voulut point d'elle ; que Marie, irritée, l'accusa d'avoir voulu attenter à son honneur; que l'empereur fit décapiter le comte; que la veuve du comte vint, la tête de son mari à la main, demander justice; qu'elle offrit l'épreuve des fers ardents; qu'elle passa sur ces fers sans les sentir ; que l'im- pératrice, au contraire, se brûla la plante des pieds, et qu'alors l'empereur la fit mourir.

Ce conte ressemble à toutes les légendes de ces siècles de bar- barie. Il n'y avait, du temps de l'empereur Othon III, ni de Marie d'Aragon, ni de comte de Modène. C'est assez qu'un ignorant ait écrit de telles faussetés pour que cent auteurs les copient : les Maimbourg les adoptent; les Lenglet les répètent dans leur Chronologie universelle, avec la bataille des serpents, et l'aventure d'un archevêque de Mayence mangé par les rats. Toutes ces fables

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