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CONCLUSION ET EXAMEN


On a dit, dans VEssai sur les Mœurs^, etc., que dans tous les pays où l'on cessa d'exorciser, on ne vit presque plus de possessions et de sortilèges. Il est vrai qu'il y en eut infiniment moins qu'ailleurs; mais on ferait trop d'honneur à la nature humaine de croire que les possessions du diable et les sortilèges cessèrent entièrement chez les peuples séparés de l'Église romaine.

Telle est la faiblesse de l'esprit humain, telle est la contra- diction de ses pensées, que longtemps encore après qu'on eut aboli les exorcismes chez les réformés, ils admirent quelquefois des possessions du diable et des sortilèges. Il y eut de prétendus magiciens brûlés en Danemark, en Suède, en Pomèranie, en Hollande, et ailleurs. Vous en trouverez dans le Monde enchanté de Bekker des relations très-authentiques ; vous verrez même que plus d'un ministre de l'Évangile a cru ou feint de croire à ces possessions et à ces sortilèges, de peur qu'en les rejetant ils ne semblassent détruire une partie du christianisme fondé sur cette base: car, disaient-ils, puisque nous convenons tous que le diable nous inspire des pensées, et que les pensées agissent sur les corps, pourquoi le diable n'aurait-il pas le même pouvoir sur nos corps que sur nos âmes? Cette manière de raisonner pourrait être appliquée aux possessions, mais elle ne prouverait pas qu'il y a des sorciers. Ce n'est pas ici le lieu d'approfondir ces questions ; il nous suffit de connaître que la raison humaine, en se délivrant d'une erreur, en conserve plusieurs autres, et s'en forme encore de nouvelles, et que le nombre des sages est bien petit dans les temps même les plus éclairés.

V. — DE l'ÉVÊQUE OPAS.

La vérité de l'histoire a obligé de dire que l'évêque de Séville Opas fut, avec le comte Julien, le premier instrument dont se servirent les Maures pour subjuguer l'Espagne: c'est un fait si connu qu'il eût été aussi honteux de ne point parler qu'il Test de le contredire. L'Abrégé chronologique de l'histoire d'Espagne^ appelle l'évêque Opas le plus mauvais prêtre et le plus mauvais citoyen du royaume.

Les reproches faits a l'auteur d'avoir quelquefois loué des

1. (Hiaiiitrc cxxviii, loiiu' \1I, pai;c 'J'.HI.

2. Voyez tome XI, page 313.

3. 11 s'agit de l'ouvrage de Dcsormeaux et Dutortic, 1758, cinq volumes in-1'2, et non de celui de Macquer et Lacombe.ciui porte le munie titre, 1705, deux volumes in-8».