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vrai Dieu et vrai homme tout ensemble, attendu que la Divinité se serait véritablement incarnée en lui; au moyen de quoi la nature divine se trouvant jointe et unie hypostatiquement, comme ils disent, avec la nature humaine, ces deux natures auraient fait dans Jésus-Christ un vrai Dieu et un vrai homme : ce qui ne s’était jamais fait, à ce qu’ils prétendent, dans les dieux des païens.

Mais il est facile de faire voir la faiblesse de cette réponse : car, d’un côté , n’aurait-il pas été aussi facile aux païens qu’aux chrétiens de dire que la Divinité se serait incarnée dans les hommes qu’ils adoraient comme dieux? D"un autre côté, si la Divinité avait voulu s’incarner et s’unir hypostatiquement à la nature humaine dans leur Jésus-Christ, que savent-ils si cette même Divinité n’aurait pas bien voulu aussi s’incarner et s’unir hypostatiquement à la nature humaine dans ces grands hommes, et dans ces admirables femmes qui, par leur vertu, par leurs belles qualités, ou par leurs belles actions, ont excellé sur le commun des hommes, et se sont fait ainsi adorer comme dieux et déesses ? Et si nos christicoles ne veulent pas croire que la Divinité se soit jamais incarnée dans ces grands personnages, pourquoi veulent-ils nous persuader qu’elle se soit incarnée dans leur Jésus? Où en est la preuve? leur foi et leur créance, qui étaient dans les païens comme dans eux. Ce qui fait voir qu’ils sont également dans l’erreur les uns comme les autres.

Mais ce qu’il y a en cela de plus ridicule dans le christianisme que dans le paganisme, c’est que les païens n’ont ordinairement attribué la divinité qu"à de grands hommes, auteurs des arts et des sciences, et qui avaient excellé dans des vertus utiles à leur patrie; mais nos déichristicoles, à qui attribuent-ils la divinité? A un homme de néant, vil et méprisable, qui n’avait ni talent, ni science, ni adresse, né de pauvres parents, et qui, depuis qu’il a voulu paraître dans le monde et faire parler de lui, n’a passé que pour un insensé et pour un séducteur, qui a été méprisé, moqué, persécuté, fouetté, et enfin qui a été pendu comme la plupart de ceux qui ont voulu jouer le même rôle, quand ils ont été sans courage et sans habileté.

De son temps il y eut encore plusieurs autres semblables imposteurs qui se disaient être le vrai messie promis par la loi : entre autres un certain Judas Galiléen, un Théodore, un Barchon, et autres, qui, sous un vain prétexte, abusaient les peuples, et tâchaient de les faire soulever pour les attirer à eux, mais qui sont tous péris.

Passons à ses discours et à quelques-unes de ses actions, qui