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326 EXTRAIT DES SENTIMENTS

concevrez dans votre sein et que vous enfanterez un fils que vous nommerez Jésus. Il sera grand, sera appelé le fils du Très-Haut, Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il ré- gnera à jamais dans la maison de Jacob, et son règne n'aura point de fin. [Matth., i, 20, et Luc, i, 30.)

Jésus commença à prêcher et à dire : « Faites pénitence, car le royaume du ciel approche. [Matth., iv, 17.) Ne vous mettez pas en peine, et ne dites pas : Que mangerons-nous ou hoi- rons-nous? ou de quoi serons-nous vêtus? car votre père céleste sait que toutes ces choses vous sont nécessaires. Cherchez donc premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données pour surcroît. » [Matth. ,yi, 31, 32, 33.)

Or, maintenant que tout homme qui n'a pas perdu le sens commun examine un peu si ce Jésus a été jamais roi, si ses dis- ciples ont eu toutes choses en abondance.

Ce Jésus promet souvent qu'il délivrera le monde du péché. Y a-t-il une prophétie plus fausse, et notre siècle n'en est-il pas une preuve parlante ?

Il est dit que Jésus est venu sauver son peuple. Quelle façon de le sauver ! C'est la plus grande partie qui donne la dénomi- nation à une chose : une douzaine ou deux, par exemple, d'Es- pagnols ou de Français, ne sont pas le peuple français ou le peuple espagnol ; et si une armée de cent vingt mille hommes était faite prisonnière de guerre par une plus forte armée d'en- nemis, et si le chef de cette armée rachetait seulement quelques hommes, comme dix à douze soldats ou officiers, en payant leur rançon, on ne dirait pas pour cela qu'il aurait délivré ou racheté son armée. Qu'est-ce donc qu'un dieu qui vient se faire crucifier et mourir pour sauver tout le monde, et qui laisse tant de nations damnées? Quelle pitié et quelle horreur!

Jésus-Christ dit* qu'il n'y a qu'à demander et qu'on recevra, qu'à chercher et qu'on trouvera. Il assure que tout ce qu'on de- mandera à Dieu en son nom- on l'obtiendra; et que si l'on avait seulement la grosseur d'un grain de moutarde de foi', l'on ferait, par une seule parole, transporter des montagnes d'un endroit à un autre. Si cette promesse est véritable, rien ne paraîtrait im- possible à nos christicoles qui ont la foi à leur Christ, Cependant tout le contraire arrive.

��1. Matth., VII, 7, 8.

2. Jean, xvi, '23.

3. Matth., xvn, 10.

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