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302 EXTRAIT DES SENTIMENTS

Dieu, et le Christ lui-même qu'ils adorent comme un Dieu fait homme, nous marquent expressément qu'il y a non-seulement de faux prophètes, c'est-à-dire des imposteurs qui se disent en- voyés de Dieu et qui parlent en son nom, mais nous marquent expressément encore qu'ils font et qu'ils feront de si grands et si prodigieux miracles que peu s'en faudra que les justes n'en soient séduits. Voyez Matthieu, xxiv, 5, 11, 24, et ailleurs.

De plus, ces prétendus faiseurs de miracles veulent qu'on y ajoute foi, et non à ceux que font les autres d'un parti contraire au leur, se détruisant les uns les autres.

Un jour, un de ces prétendus prophètes, nommé Sédécias, se voyant contredit par un autre appelé Michée, celui-là donna un souffleta celui-ci, et lui dit plaisamment ^ : « Par quelle voie l'esprit de Dieu a-t-il passé de moi pour aller à toi ? » Voyez encore III, Reg., xviii, 40 et autres.

Mais comment ces prétendus miracles seraient-ils des témoi- gnages de vérité, puisqu'il est clair qu'ils n'ont pas été faits? Car il faudrait savoir: 1" si ceux que l'on dit être les premiers auteurs de ces narrations le sont véritahlement ; 2° s'ils étaient gens de probité, dignes de foi, sages et éclairés, et s'ils n'étaient point prévenus en faveur de ceux dont ils parlent si avantageusement; 3° s'ils ont bien examiné toutes les circonstances des faits qu'ils rapportent, s'ils les ont bien connues, et s'ils les rapportent bien fidèlement; 4° si les livres ou les histoires anciennes qui rap- portent tous ces grands miracles n'ont pas été falsifiés et cor- rompus dans la suite du temps, comme quantité d'autres l'ont été.

Que l'on consulte Tacite et quantité d'autres célèbres histo- riens au sujet de Moïse et de sa nation, on verra qu'ils sont re- gardés comme une troupe de voleurs et de bandits. La magie et l'astrologie étaient pour lors les seules sciences à la mode ; et comme Moïse était, dit-on, instruit dans la sagesse des Égyptiens, il ne lui fut pas difficile d'inspirer de la vénération et de l'at- tachement pour sa personne aux enfants de Jacob, rustiques et ignorants, et de leur faire embrasser, dans la misère où ils étaient, la discipline qu'il voulut leur donner. \o\Vd qui est bien diil'érent de ce que les Juifs et nos chrislicoles nous en veulent faire accroire. Par quelle règle certaine counaîtra-t-on qu'il faut ajouter foi à ceux-ci plutôt qu'aux autres? Il n'y en a certaine- ment aucune raison vraisemblable.

I. 11. l'aral., x\iii. 'J3. {\ole de VolUiirc.)

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