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REMARQUES
SUR

DEUX ÉPITRES D’HELVÉTIUS[1]

PREMIÈRE EPÎTRE.
SUR L’ORGUEIL ET LA PARESSE D’ESPRIT.

La première leçon donnait à cette épitre un titre trop développé. Helvétius y annonçait qu’il se proposait de prouver que « tout est rapport ; que les philosophes se sont perdus dans le vague des idées absolues ; qu’ils eussent mieux fait de travailler au bien de la société ; que Locke nous a ouvert la route de la vérité, qui est celle du bonheur ».

Voici la note que Voltaire adressait à ce sujet à son jeune élève :

« Ce titre est un peu long et ne paraît pas extrêmement clair. Le mot d’idées absolues ne donne pas une idée bien nette. D’ailleurs, en général, la chose n’est pas vraie. Il y a un temps absolu, un espace absolu, etc. Locke les considère comme tels, et vous êtes ici partisan de Locke. Locke n’est point regardé comme un philosophe moral, qui ait abandonné l’étude des choses abstraites pour envisager seulement la vertu. La route de la vérité n’est pas toujours celle du bonheur. On peut être très-malheureux, et savoir mesurer des courbes ; on peut être très-heureux et ignorant ».

  1. Ces remarques ont été publiées pour la première fois en l’an VIII (1800) par François de Neufchâteau, dans le tome second de son Conservateur. Les préambules et explications sont de François de Neufchâteau. Ces Remarques sont postérieures au 31 mai 1740, puisque, dans une note de la page 12, il est question du roi de Prusse Frédéric II. N’ayant pas découvert leur date précise, Beuchot les a laissées à la suite des Conseils.