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FRAGMENT

D’UN
MÉMOIRE ENVOYÉ À DIVERS JOURNAUX[1]

(1738)

On vient de m’avertir qu’on fait une application aussi mal fondée qu’injurieuse de ces mots par lesquels j’avais commencé ces Essais sur les éléments de Newton : Ce n’est point ici une marquise ni une philosophie imaginaire. Je suis si éloigné d’avoir eu en vue l’auteur de la Pluralité des mondes[2] que je déclare ici publiquement que je regarde son livre comme un des meilleurs qu’on ait jamais faits, et l’auteur comme un des hommes les plus estimables qui aient jamais été. Je ne suis pas accoutumé à trahir mes sentiments. D’ailleurs, je ne crois pas qu’il soit possible de penser autrement.

Lorsque j’eus l’honneur d’entendre à Cirey les dialogues italiens de M. Algarotti[3], dans lesquels les principaux fondements

  1. Dans une lettre à Moussinot, du 9 mai 1738, on voit que Voltaire avait envoyé à divers journaux un Mémoire, qu’il m’a été impossible de trouver. Le fragment que je donne ici a été imprimé dans le Journal des Savants, de juin 1738. Il se pourrait que ce fût la fin du mémoire imprimé dans le même journal, en octobre, et qu’on trouvera ci-après. (B.)
  2. Ceci est en contradiction avec ce que Mme du Châtelet écrivait à Maupertuis, le 9 mai 1738 : « Il y a un trait dans le commencement sur les marquises imaginaires, qui ne plaira pas à M. de Fontenelle, ni à M. Algarotti ; il (Voltaire) l’avait ôté dans l’édition de France ; je ne sais comment il s’est glissé dans celle de Hollande : je crois qu’il ne vous déplaira pas, car je sais que vous n’aimez pas les affiquets dont ces messieurs surchargent la vérité. » On sait que la prétendue marquise de G…, chez laquelle ont lieu les Entretiens sur la pluralité des mondes, était Mme de La Mésangère, de Rouen. Le parc décrit par Fontenelle était celui de cette dame, qui était brune ; mais comme elle ne voulait pas qu’on la reconnût, Fontenelle fit sa marquise blonde. (B.)
  3. Le Newtonianisme pour les dames.