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POURQUOI (LES).

Pourquoi n’était-il pas permis de vendre en Picardie le blé recueilli en Champagne, sans une permission expresse, comme on obtient à Rome pour trois jules la permission de lire des livres défendus ?

Pourquoi laissait-on si longtemps la France souillée de l’opprobre de la vénalité ? Il semblait réservé à Louis XV d’abolir cet usage d’acheter le droit de juger les hommes, comme on achète une maison de campagne, et de faire payer des épices à un plaideur, comme on fait payer des billets de comédie à la porte.

Pourquoi instituer dans un royaume les charges et dignités[1] de

Conseillers du roi... Inspecteurs des boissons,

Inspecteurs des boucheries,
Greffiers des inventaires,
Contrôleurs des amendes,
Inspecteurs des cochons,
Péréquateurs des tailles,
Mouleurs de bois à brûler,
Aides à mouleurs,
Empileurs de bois,
Déchargeurs de bois neuf,
Contrôleurs des bois de charpente,
Marqueurs de bois de charpente,
Mesureurs de charbon,
Cribleurs de grains,
Inspecteurs des veaux,
Contrôleurs de volailles,
Jaugeurs de tonneaux,
Essayeurs d’eaux-de-vie,
Essayeurs de bière,
Mouleurs de tonneaux,
Débardeurs de foin,
Planchéieurs-débâcleurs,
Auneurs de toile,
Inspecteurs des perruques[2] ?

  1. Le contrôleur-général Ponchartrain, depuis chancelier, est un des ministres qui ont le plus employé ce moyen d’obtenir des secours momentanés ; c’est lui qui disait : « La Providence veille sur ce royaume ; à peine le roi a-t-il créé une charge, que Dieu crée sur-le-champ un sot pour l’acheter. » (K.)
  2. Voltaire a déjà parlé de l’établissement de ces charges dans le chapitre xxx du Siècle de Louis XIV. On peut, sur l’établissement des Contrôleurs des perruques dans toute l’étendue du royaume, consulter le Journal de Verdun, avril 1706, page 238. (B.)