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ACTE TROISIÈME.


Scène I.

LE COMTE, L’ÉTRIER.
L’ÉTRIER.

Votre Excellence n’a pas le sou, à ce que je vois.

LE COMTE.

Il est vrai : ayant su que mon rendez-vous n’était que pour le soir, j’ai été jouer chez la grosse duchesse ; j’ai tout perdu. Mais j’ai de quoi me consoler : ce sont au moins des gens titrés qui ont eu mon argent.

L’ÉTRIER.

Argent mal acquis ne profite pas, comme vous voyez.

LE COMTE.

Il n’était, ma foi, ni bien ni mal acquis ; il n’était point acquis du tout : je ne sais qui me l’a envoyé ; c’est pour moi un rêve, je n’y comprends rien. Il semble que Fanchon ait voulu se moquer de moi. Voilà pourtant vingt mille francs que j’ai reçus et que j’ai perdus en un quart d’heure. Oui, je suis piqué, je suis piqué, outré ; je sens que je serais au désespoir si cela n’était pas au-dessous de moi… Mons de l’Étrier !

(Fanchon, entrée pendant que le comte parlait, entend la fin de son discours.)

Scène II.

LE COMTE, FANCHON.
FANCHON, faisant signe à l’Étrier de sortir.

C’est-à-dire, notre beau-frère, que vous avez perdu l’argent que je vous avais donné tantôt.

LE COMTE.

Ne songeons point à ces bagatelles, ma belle enfant. Quand voulez-vous me faire voir cette généreuse inconnue, cette beauté,