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AVERTISSEMENT
DES ÉDITEURS DE L’ÉDITION DE KEHL.

Cette pièce fut jouée le 15 février 1720. Elle eut peu de succès[1]. Le fond de l’intérêt est le même que dans Mariamne. C’est également une femme vertueuse persécutée par un mari cruel qu’elle n’aime point. Mais la fable de la pièce, le caractère des personnages, le dénoûment, tout est différent ; et, à l’exception d’une scène entre Cassandre et Artémire, qui ressemble à la scène du quatrième acte, entre Hérode et Mariamne, il n’y a rien de commun entre les deux pièces. On n’a pu retrouver Artémire ; il n’en reste que la scène dont nous venons de parler, une parodie jouée à la Comédie-Italienne, et le rôle d’Artémire tout entier.

D’après ces débris, nous avons essayé de retrouver le plan de la pièce ; mais celui qu’on pourrait deviner d’après la parodie est fort différent du

  1. Une note du Temple du Goût apprend qu’Artémire eut huit représentations. La pièce n’avait pas roussi à la première, et l’auteur l’avait même retirée ; mais le 23 février, on en donna une seconde représentation, avec des changements, et cette tragédie eut quelque succès. Elle fut jouée pour la huitième et dernière fois le 8 mars. Je crois que ce qui détermina Voltaire à faire cesser de jouer sa pièce fut la parodie que, le 10 mars, Dominique fit jouer aux Italiens sous le même titre d’Artémire. Cette parodie est imprimée dans le premier volume du recueil des Parodies du nouveau théâtre italien. Voltaire n’a jamais voulu laisser imprimer sa tragédie. Feu Decroix, l’un des rédacteurs de l’édition de Kehl, en ayant recueilli quelques fragments, les fit imprimer dans l’édition à laquelle il coopérait. De nouvelles recherches lui procurèrent une copie du rôle d’Artémire, corrigée de la main de l’auteur. Le comte d’Argental se rappela aussi quelques vers. Telle est la source des nouveaux fragments que j’ai ajoutés, et dont je suis redevable à feu Decroix.

    Luchet, dans son Histoire littéraire de Voltaire, dit que c’est à l’occasion d’Artémire « que les députés des comédiens du roi offrirent à MM. de l’Académie française l’entrée de leur spectacle ». Voltaire ne fut de l’Académie que vingt-six ans plus tard, et je ne vois pas quel rapport peut avoir existé entre Artémire et l’Académie française.

    Mouhy, dans son Abrégé de l’histoire du théâtre français, dit que, le 2 mars 1732, sept députés des comédiens du roi se rendirent à l’Académie française, et que le sieur Quinault Dufresne y prononça un discours par lequel il invitait les académiciens à prendre leurs places gratis à la comédie. Mouhy se trompe d’un jour : le 2 mars 1732 était un dimanche, et l’Académie ne tint pas de séance ; ce fut le lendemain lundi, 3 mars 1732, qu’elle reçut la députation des comédiens. Il y avait douze ans moins cinq jours qu’avait eu lieu la dernière représentation d’Artémire. Il n’est donc pas à croire que cette pièce fût pour quelque chose dans la démarche des comédiens. B.