Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome10.djvu/139

Cette page n’a pas encore été corrigée

[tis] LE RUSSK A PARIS. 429

Au lieu du Misanthrope on voit Jacques Rousseau, Qui, marchant sur ses'mains, et mangeant sa laitue'. Donne un plaisir bien noble au public qui le hue. Voilà nos grands travaux, nos beaux-arts, nos succès, Et l'honneur éternel de Tempire français. A ce brillant tableau connaissez ma patrie.

LE RUSSE.

Je vois dans vos propos un peu de raillerie;

Je vous entends assez : mais parlons sans détour :

Votre nuit est venue après le plus beau jour.

Il en est des talents comme de la finance ;

La disette aujourd'hui succède à l'abondance :

Tout se corrompt un peu, si je vous ai compris.

Mais n'est-il rien d'illustre au moins dans vos débris?

Minerve de ces lieux serait-elle bannie?

Parmi cent beaux esprits n'est-il plus de génie?

LE PARISIEN.

Un génie? ah, grand Dieu! puisqu'il faut m'expliquer.

S'il en paraissait un que l'on pût remarquer.

Tant de témérité serait bientôt punie.

Non, je ne le tiens pas assuré de sa vie.

Les Berthiers, les Chaumeix, et jusques aux Frérons,

Déjà de l'imposture embouchent les clairons.

réputation éclatante. Tout Paris courut à son cabaret; des princes du sang même allèrent voir M. Ramponeau.

Une troupe de comédiens établis sur les remparts s'engagea à lui payer une somme considérable pour se montrer seulement sur leur théâtre, et pour y jouer quelques rôles muets. Les jansénistes firent un scrupule à Ramponeau de se pro- duire sur la scène; ils lui dirent que Tortullien avait écrit contre la comédie; qu'il ne devait pas ainsi prostituer sa dignité de cabarctier; qu'il y allait de son salut. La conscience de Ramponeau fut alarmée. Il avait reçu de l'argent d'avance, et il ne voulut point le rendre, de peur do se damner. Il y eut procès. M. Élie de Beau- mont, célèbre avocat, daigna plaider contre Ramponeau; notre poète philosophe plaida pour lui, soit par zèle pour la religion, soit pour se réjouir. Ramponeau rendit l'argent, et sauva son âme. {Note de Voltaire, 177L)

— Voltaire composa dans le temps une facétie qu'il intitula Plaidoyer de Ram- poneau. (B.)

1. La même année 17G0, on joua sur le théâtre de la Comédie-Française la comédie des Philosophes, avec un concours de monde prodigieux. On voyait sur le théâtre Jean-Jacques Rousseau marchant à quatre pattes et mangeant une laitue. Cette facétie n'était ni dans le goût du Misanthrope, ni dans celui du Tartuffe: mais elle était bien aussi théâtrale que celle de Pourceaugnac, qui est poursuivi par des lavements et des fils de p

Le reste de la pièce ne parut pas assez gai; mais on ne pouvait pas dire que ce fût là de la comédie larmoyante. On reprocha à l'auteur d'avoir attaqué de très- honnêtes gens dont il n'avait pas à se plaindre. {Note de Voltaire, 1771.)

10. — Satires. 9

�� �