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M. Duru.

Il faut se consoler.Ma femme me ruine.
Vous voyez quel logis et quel train. La coquine !

M. Gripon.

Sois le maître chez toi, mets-la dans un couvent.

M. Duru.

Je n’y manquerai pas. Je trouve en arrivant
Des laquais de six pieds, tous ivres de la veille ;
Un portier à moustache, armé d’une bouteille,
Qui, me voyant passer, m’invite en bégayant,
À venir déjeuner dans son appartement.

M. Gripon.

Chasse tous ces coquins.

M. Duru.

Chasse tous ces coquins.C’est ce que je veux faire.

M. Gripon.

C’est un profit tout clair. Tous ces gens là, compère,
Sont nos vrais ennemis, dévorent notre bien ;
Et pour vivre à son aise, il faut vivre de rien.

M. Duru.

Ils m’auront ruiné ; cela me perce l’âme.
Me conseillerais-tu de surprendre ma femme ?

M. Gripon.

Tout comme tu voudras.

M. Duru.

Tout comme tu voudras.Me conseillerais-tu
D’attendre encor un peu, de rester inconnu ?

M. Gripon.

Selon ta fantaisie.

M. Duru.

Selon ta fantaisie.Ah, le maudit ménage !
Comment a-t-on reçu l’offre du mariage ?

M. Gripon.

Oh ! fort bien : sur ce point nous ferons tous contents ;
On aime avec transport déjà mes deux enfants.

M. Duru.

Passe. On n’a donc point eu de peine à satisfaire
À mes ordres précis ?

M. Gripon.

À mes ordres précis ?De la peine, au contraire ;
Ils ont avec plaisir conclu soudainement.
Ton fils a pour ma fille un amour véhément ;