Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome04.djvu/440

Cette page n’a pas encore été corrigée

436 LA PRUDE.

DORFISE.

C’est obéir à mon ordre un peu vite. Là, revenez. Mon estime est au point Que contre vous je ne me fâche point. N’abusez pas de mon estime extrême.

ADINE.

Vous estimez monsieur Blanford de même : £stime-t-on deux hommes à la fois ?

DORFISE.

Oh ! non, jamais ; et les aimables lois

De la raison, de la tendresse sage,

Font qu’on succède, et non pas qu’on partage.

Vous apprendrez à vivre auprès de moi.

ADINE.

J’apprends beaucoup par tout ce que je voi.

DORFISE.

Lorsque le ciel, mon fils, forme une belle, Il fait d’abord un homme exprès pour elle ; Nous le cherchons longtemps avec raison. On fait vingt choix avant d’en faire un bon ; On suit une ombre, au hasard on s’éprouve ; Toujours on cherche, et rarement on trouve : L’instinct secret vole après le vrai bien...

(Vivement et tendrement.)

Quand on vous trouve, il ne faut chercher rien,

ADINE.

Si vous saviez ce que j’ai l’honneur d’être, Vous changeriez d’opinion peut-être.

DORFISE.

Eh l’point du tout.

ADINE.

Peu digne de vos soins. Connu de vous, vous m’estimeriez moins. Et nous serions attrapés l’un et l’autre.

DORFISE.

Attrapés ! vous I quelle idée est la vôtre ? Mon bel enfant, je prétends... Ah ! pourquoi Venir sitôt m’interrompre ?... Eh ! c’est toi !